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 Métissage

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La Gardienne
Je suis l'autorité, craignez que je lâche Sarah
La Gardienne


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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:23

[quote name='Kyra' date='Wednesday 08/07/2009 à 14:18' post='117606']


Citation :
Cher journal,

Cette fois ça y est : nous y sommes ! Je pars à la conquête de ma vraie nature. Je suis en croisade contre l’humanité ! Oui, moi ! Car je suis une haute-Elfe, et par Valar j’ai même appris un tout nouveau mot…

Ce matin nous sommes partis nous promener dans le cimetière tous ensemble une dernière fois. C’est un peu une coutume de dire au revoir aux morts ici quand on a prévu de s’absenter pendant longtemps. En fait c’est comme avec les chiens. On leur dit de ne pas bouger, qu’on va faire une course et qu’on revient ! Comme ça ils restent tranquilles. Bin avec les morts c’est pareil.
Pendant la promenade, maman s’est offusquée du mauvais traitement de certaines plantes et papa m’a fait tout un discours sur les bizarreries des Elfes pour me préparer à leur « accueil ». Ah, et aussi de ne surtout pas approcher leurs plantations. Bizarre.
Pendant ce temps, ma sœur s’amusait à dire bonjour à chacune des pierres tombales ou mémoriaux qu’elle croisait. A mon avis elle ça va pas fort. Elle est complètement détraquée de l’hémisphère nord ! C’est congelé là haut, c’pas possible…

Là je viens d’emménager dans mes appartements au royaume des Haut-Elfes. Enfin je pourrais montrer ma véritable nature ! Jamais me cacher ! Je pourrais briller ! Je pourrais défaire mon foulard et sentir le vent sur mes oreilles d’Elfe ! Je pourrais… je pourrais !!!!

Bienvenue chez toi qu’elle disait maman… Bin papa avait raison, il aurait dû venir lui aussi ! Je comprends maintenant pourquoi ma mère faisait cette tête là quand j’insistais pour y retourner, et pour de bon. Ah ça, je me suis jamais sentie aussi humaine de toute ma vie ! Faudrait savoir ce que vous voulez à la fin !!!!!!!

Jour X, Année X, ykunybrupa (je bouge plus de cette pièce!)


Le bruit des chaînes avait cessé depuis longtemps. Voila des mois qu’on les torturait. De longs mois interminables qui finirent par leur faire perdre toute notion du temps. La nourriture se raréfiait alors que les coups de fouets acerbes qui mordaient leur chair s’intensifiaient. Plus récemment, les cris devinrent des gémissements, et les gémissements moururent, remplacés par un souffle muet, un râle désespéré. Puis le néant.
Enfin ! Leur corps inanimé épargnait aux oreilles de leur bourreau le tintement métallique des liens de fer, insupportable pour son ouïe Elfique aiguisée. Les hurlements et insultes qu’ils vomissaient ; passe encore. Mais cette continuité d’éclats qui tiraillaient les tympans sensibles d’Atrebürh l’auraient rendu fou. Cette pause dans les bois et son dernier voyage en mer étaient l’échappatoire nécessaire et méritée pour mieux reprendre ses activités. Quel bien cela lui avait procuré !
S’il avait su plus tôt que les deux impies ne trouvaient plus la force d’émettre le moindre mouvement, peut-être aurait-il écourté son séjour pour le seul plaisir du silence.

_vvv…

Le druide se dressa en levant un sourcil hautin. Il ne pu contenir le sourire narquois qui écharpait son visage fin comme il s’extasiait du quasi mutisme douloureux du jeune homme. Son oreille délicate et dressée frôla la bouche tuméfiée du prisonnier.

_Plait-il mon trésor? Se moqua Atrebürh.
_Vvvotre… (Sensei inspira difficilement mais lâcha tout de même un triste murmure) vvvotre vesssie vous est-elle ca…capricieuse p…pour tous ces aller/retour ?
L’expression du druide se figea instantanément.
_sss… C’est l’âge.

Quelque chose siffla dans l’air avant qu’un éclat blanc ne s’empare de la vision trouble de Sensei. « Valar vous châtie ! » Quand son œil valide se réajusta à sa manière, Sensei découvrit le druide se massant la main droite, les yeux exorbités de rage, de folie, ou peut-être des deux. Il en déduisit qu’il s’était blessé en le giflant.
Les deux autres Elfes qui montaient la garde restaient de marbre. Seule une infime lueur dans leur yeux ébranla leur regard détaché. Pour un humain ce détail restait invisible, mais Darlyssa lisait clairement l’épouvante provoquée par les pratiques du druide. Qu’ils ne fassent rien afin de mettre un terme à cette barbarie indigne pour leur espèce lui procura un frisson amer, écœuré.

_Ah ! S’exclama Atrebürh. Je vois ici toutes sortes de choses fortes intéressantes. Continuez ma chère. Continuez de nous haïr. Continuez de souffrir ! Votre sous-espèce ne ressentira que mieux votre appel désespéré.
_Ils sont proches. Je les sens. Et vous succomberez. Vous tous. Tous les Hauts-Elfes.

Atrebürh s’esclaffa d’un rire disgracieux et faux. « Qu’ils viennent se faire purifier, je n’en attend pas moins ! »
C’était là une provocation intolérable. Le rire des elfes se voulait naturellement mélodieux, presque chanté. Il reflétait toute la pureté et la beauté de la nature.
En gloussant de la sorte, c’était toute la communauté Elfique que le druide insultait. Comment pouvait-on le laisser agir ainsi ! Si ces deux lâches qui se contentaient de rester debout comme des piquets, représentaient toute la fierté perdue des Hauts-Elfes du sud, alors qu’ils brûlent. Quand les Elfes noirs débarqueront pour la sauver, qu’ils brûlent tous jusqu’au dernier !

_Non ma chère. Répondit Atrebürh comme s’il avait lu dans ses pensées. La vie blasphématrice de votre peuple corrompu prendra bientôt fin grâce à vous.



Et patati et patata. Pourquoi ceci, pourquoi cela ? Parce que ! Mais parce que !!
Toutes ces questions qu’on lui lançait à la volée commençaient à lui taper sur le système. Evidement, Maitre toki n’en comprenait l’intonation plus que leur sens de part son vocabulaire Elfique limité.
Il s’était attendu à tout en débarquant en Célarawen. Vraiment à tout. Mais pas qu’il deviendrait l’objet de toutes les curiosités mal placées. Maitre toki se sentait l’impression d’une bête de foire sur laquelle ils étaient à deux doigts de lancer des cacahuètes, des bananes où des tomates pour susciter une réaction de sa part. (Ça bouge !)
Maitre toki dut faire preuve d’un éprouvant contrôle sur lui-même afin de retenir quelques puérilités comme…

Gwaedia n’était pas en reste. Elle était aimée, honorée et respectée. Pas seulement en tant que reine, mais également en tant que femme. Perchée du haut d’un arbre parmi tant d’autres, Maitre toki découvrit une paire d’yeux les dévisager avec insistance. Puis une deuxième, une troisième, et cette fois il ne pu se retenir :

« BOUH ! » Les enfants avaient fondu dans la nature quand Maitre toki finit par lâcher son exaspération contenue jusqu’alors. Les moins farouches osaient les encercler en mimant de grands gestes ou se courbant poliment devant la reine, imitant la gestuelle majestueuse des Elfes adultes à leur égard.
Ce n’était pas en Kaminoi que l’on risquait de se prosterner devant lui, surtout que Maitre toki l’interdirait. Ce genre de cérémonie souvent hypocrite finissait toujours par monter à la tête des Hommes convaincus au final de toute leur supériorité.
C’est pour cette raison que Maitre toki arborait une profonde fierté sur son visage devant sa promise demeurant humble et chaleureuse envers les siens. Jamais auparavant, entouré de toute cette harmonie, de toute cette vie, il ne s’était sentit si petit ; si humain. Célarawen célébrait la vie, alors que Kaminoi célébrait la mort. L’idée idyllique d’unir ces deux cultures opposées par les liens du sang et du mariage lui fit rater le contrebas de la fontaine et manqua de s’y faire baptiser de tout son poids. Une clameur d’exclamations outrées s’éleva en un murmure à peine audible, très vite balayé par des jérémiades assourdissantes trop familières :

_Maiiiitre ! Maiiiitre ! (Ne pas se retourner, siffloter et faire mine de rien, oh un ver de terre tout là bas, au loin…) Maiiitre !

Maitre toki jeta malgré lui un coup d’œil rapide en arrière. La vision sympathique d’une asperge rose aussi tendue qu’un piquet accompagnée de ses deux petites choses rondes et fripées lui fit regretter son erreur. L’image qui s’imprima dans son esprit lui en donna la nausée.

_Elle nous a retrouvé, elle nous a retrouvé ! S’étouffa un gobelin.
_Suffit! On se tait, chut, chut, chut ! J’ai déjà assez à faire avec ces deux messieurs dépourvus de manières, bien que forts séduisants je dois le reconnaître.

Maitre toki n’avait pas remarqué que deux gardes Haut-Elfes escortaient Ruberta qui gesticulait nerveusement sur ses talons vertigineux. Ses bras chargés de fleurs épanouies et colorées pressaient avec avarice et gourmandise leur butin contre sa poitrine couverte de plumes de flamant rose. Deux colliers en pointes reliés par une laisse en cuir à sa ceinture emprisonnaient les gobelins jumeaux de la compagnie de Ruberta comme des petits chiens. Les deux gardes vêtus d’une armure légère et élégante la bousculaient avec une certaine once de nervosité dans le regard.
Discrètement, Maitre toki se pencha à l’oreille de Gwaedia.

_Avec toutes ces fleurs pressées contre elle, je n’ose imaginer les émotions qui doivent émoustiller Ruberta en ce moment… (La reine Haute-Elfe sursauta en le dévisageant d’un air intrigué) Tu as bien eu un orgasme avec un arbre tout à l’heure, ne me regarde pas comme ça ! J’ai bien reconnu dans tes yeux cette expression que je connais par coeur…
(Rapide coup d’œil en direction de la fleur accrochée dans les cheveux d’Alaena ; Maitre toki secoua la tête. Si ça se trouve elle lui poussait directement sur le crâne.)

_ Sy naeha !! Entama l’un des gardes indignés en langage Elfique. Lad… ehtejeti muivuxia… y ádá cinbnec ah dnyeh ta lussaddna ih ylda ta bnuvyhydeuh knyja tyhc juc zyntehc !

Gwaedia avait pris soin de ne rien laisser paraître sur son visage. Même s’il n’en comprenait pas un mot, Maitre toki se l’imaginait déjà exploser de rage quand elle avança de deux pas vers la prisonnière et ses gobelins de compagnie. Ces derniers se figèrent instantanément par crainte, cessant leurs jérémiades et suppliques agaçantes. Jusqu’à ce que Face prenne son courage à deux mains boudinées reliées en signe de prière, et rompit le silence.

_Sauvez-nous du dindon infernal !! Nous laissez pas avec eux ! On les a vu !
_Pitié, crevez-nous les yeux ! Renchérit Pile.

Ruberta crucifia le pied droit du gobelin dans le sol avec pour instrument la pointe de son talon haut. Pile hurla de douleur alors que son frère se mit à éclater d’un rire agaçant.

_Que se passe-il ? Interrogea discrètement Maitre toki en retrait.
_Les gardes accusent la nounou de votre fille d’actes de profanation florale. Lui Traduisit Talena.
_Ah je vois, vous autres ne partagez pas vos végétaux orgasmiques. (Il se précipita vers Gwaedia tout en s’exclamant) Attention à ne pas trop t’énerver mon trésor, ce n’est pas bon pour le bébé !

Tous les yeux se rivèrent dans sa direction. C’est là que Maitre toki se rendit compte de son énorme maladresse. Le rouge escalada son visage jusqu’à ce que son malaise lui fasse bafouiller quelques syllabes inaudibles.

_Euh. Hé hé !

L’illusionniste se gratta nerveusement la nuque avant de disparaître *Pouf !* quand les premiers signes d'agoraphobie se firent sentir.

_ Je vous préviens, je suis équipé d’une double épaisseur d’armure en écailles de dragons… Triplée à l’entrejambe ! Pouvait-on entendre dans le vide.
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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:24

[quote name='Gwaedia' date='Thursday 01/10/2009 à 16:27' post='118188']


Citation :

Cher journal,

Je suis toujours au pays des Elfes, et je viens d’avoir ma première communion avec la nature !!! Ça m’a fait comme des gargouillis dans le ventre, mais pas comme si j’avais faim ou si j’étais malade. En fait… c’était bien ! Je ne sais pas si je dois le dire, mais je comprends pourquoi on dit que la communion est quelque chose d’intime. JE VEUX RETOURNER CUEILLIR DES FLEURS !!! Ma maman était ravie quand tout le monde s’inclinait devant moi. Je trouvais ça marrant, maman trouvait ça touchant et mon père trouvait ça débile… J’aime beaucoup ma famille et je suis heureuse de l’avoir parce je suis sure qu’il n’y en a pas d’autre comme celle-là !

Jour X, Année X, amoureuse des fleurs.


Le silence pesait dans l’atmosphère si gaie d’habitude. Tout les yeux étaient rivés sur la Reine qui pencha sa tête sur le côté et haussa les épaules.

- In puir you v'eddirtm or wucm. Or ryofieo Valar fe fyuh ci vyoh ! dit-elle en souriant.

Tout les Hauts-Elfes se regardèrent avec un mélange de surprise, se sachant que faire. Pendant ces quelques petites secondes de non-dit, toki en profita pour tapoter l’épaule de Taléna pour espérer une traduction.

- Notre Reine vient de dire : Eh bien oui j'attends un fils. Un nouveau Valar va voir le jour… chuchota-elle.

Le Maitre de Kaminoi commença à se préparer mentalement à une ruade collective suivie d’un passage à tabac et d’une lapidation excessive, mais, il se passe tout autre chose. Tout les Hauts-Elfes se mirent à crier de joie, chanter et danser tout autour de leur Reine bien-aimée, plus heureux que jamais ! Un Valar… un nouveau béni des Dieux allait naître, même à moitié Humain le « Beau Peuple » était comblé.
Toki, surpris mais néanmoins soulagé d’être encore en vie, se risqua à se rapprocher de sa chère fiancée qui lui sourit grandement. Tout c’était bien passé, un miracle, une aide de son ancêtre ou simplement l’humilité de Son Peuple ? Les questions que Gwaedia se posait fut vite balayées car peu importait comment, le résultat était là : ils étaient heureux et elle aussi.

La nuit tombait et un grand banquet se tenait sur la grande place, en plein air. La musique résonnait partout en Celarawen, une mélodie lancinante, suave, enivrante et particulièrement joyeuse. Deux femmes Hautes-Elfes chantaient un refrain étrange. Leurs voix, dans un unisson parfait, se répercutaient en écho dans les oreilles des Humains présents. Ils étaient là, béats en fixant des yeux des deux chanteuses tandis que d’autres dansaient et chantaient à tue-tête autour des lampions disposés en tas comme un feu de bois. En effet, les Hauts-Elfes, pourfendeurs de la sauvegarde de la nature au moins autant que les Sylvaniens, se refusaient de brûler du bois autant que possible. Il faisait doux ce soir-là, pas besoin d’un grand feu…

- Taléna et moi allons enchanter les oreilles de tes pauvres gens toki parce que…

L’illusionniste l’écoutait à peine, un grand filet de bave coulant sur son menton, tandis qu’il fixait la chanteuse blonde, quand soudain une horrible douleur dans le bas du dos le fit descendre brusquement sur terre.

_AIEEEEE ! Hein ? Quesskia ?

- Je disais que Taléna et moi allons VOUS enchanter afin que notre ivresse ne vous monte trop à la tête ! dit-elle d’un ton brusque.

_ Je vois pas pourquoi ? Mes hommes sont heureux d’être accueillit parmi les tiens c’est tout ?

- Ah oui ? Et ça tu en penses quoi ?

Trois des gardes de toki étaient en effet en train d’imiter les animaux de la forêt avec le plus profond crétinisme dont ils étaient capables, ce qui amusait grandement les Elfes qui les regardaient avec beaucoup d’amusement.

_Euh oui vas-y… et vite ! Sinon je vais vraiment passer pour un débile en plus d’être pauvrement Humain…

- Ils t’aiment beaucoup toki. Dit-elle en levant ses mains qu’elle appliqua délicatement sur les oreilles de son futur époux.

_ Qu’est-ce que tu fais là ?

- Je vais commencer par toi mon cher, sinon je risque fort de te tuer et de t’enlever tout ce qui fait de toi un homme…

Pendant tout le reste de la soirée, toki resta à plus de cent mètres de n’importe quelle présence féminine.

Alaena prit deux grandes feuilles de Salayek, dont les Hauts-Elfes se servaient comme support de nourriture, remplies de fruits et traversa le banquet en souriant et en formulant les politesses d’usage aux Hauts-Elfes qui s’inclinaient devant elle. La Princesse s’éloigna de la fête qui battait encore son plein alors que la Lune était déjà haute dans le ciel magnifiquement étoilé et arriva à un belvédère qui donnait vue sur la Grande Mer.

- Tenez Mère.

- Merci ma chérie, dit Gwaedia en prenant la feuille de Salayek que sa fille lui tendait. Notre Peuple accepte bien la nouvelle. Même si je donnerai naissance à un Demi-Elfe…

- Ne vous inquiétez point Mère, notre vision des choses a changé depuis votre naissance.

- Dirais-tu que je suis veille ? dit sa mère moitié indignée, moitié amusée.

- Non point Mère, répondit Alaena sur le même ton. Mais vous voyez bien ce que je veux dire !

Gwaedia et elle se mirent à rire joyeusement. Et la fête continua jusqu’à tôt le matin… Jamais elle ne s'était sentie aussi heureuse, mais cet instant de félicité ne dura pas.

La Reine se réveilla à côté de son amour. La chambre était très éclairée car le soleil brillait haut dans le ciel. Se tournant vers toki, elle le regarda dormir puis elle caressa doucement sa joue. Celui-ci ouvrit ses yeux et lui sourit.

- Il était déjà plus de trois heures, nous devrions nous lever Mon Amour.

_ Oh tu ne veux pas rester un peu au lit ? Supplia toki, on a fait la fête tard !

- La fête va durer encore trois jours je te signale...

_ Que quoi ? Oh mon pauvre corps ne va pas supporter le choc.

- Tes fêtes durent une semaines entière ! répliqua Gwaedia.

_ Nous nous "nourrissons" pendant la semaine...

Les draps volèrent et la Haute-Elfe se leva, piquée au vif.

_ Je suis désolée mon amour je n'aurai pas du dire ça... Dit toki. Je...

La Reine restait figée et se mit à pleurer, fixant son bureau.

_ Je te jure que je suis désolée et...

- Ce... ce n'est pas à... à cause de ça, dit-elle en pleurant.

_ Qui y a-t-il ?

Pour toute réponse, elle pointa son bureau du doigt. Son fiancé se leva et vit un poignard dont la lame était cassée. Une lame dont il reconnut tout de suite sa provenance car il l'avait déjà vu : Un soir dans une forêt, Gwaedia qui trébuche, toki qui retire un morceau de métal de son pied...

Maitre toki prit la lame dans sa main, un regard emplit de haine.
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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:26

[quote name='Kyra' date='Saturday 03/10/2009 à 21:01' post='118195']


Citation :
Cher journal,

Comment ça va aujourd’hui ? Moi je grandi. Lentement, mais sûrement ! Je ne pensais pas qu’il était possible d’apprendre l’Elfique aussi vite. Bon, bon, d’accord. Maman m’avait déjà appris les bases depuis que je suis toute petite, seulement c’est différent quand il faut passer à la pratique. Et puis je le comprends plus que je ne le parle complètement en fait.
Moi, j’avais choisi Nain en langage secondaire. Oh la la ! Jamais je n’avais vu ma mère aussi énervée que ce jour là ! Ça tremblait dans tout le château !!! Et bien évidement, l’idée ne pouvait venir que de mon père selon elle. C’est toujours sa faute quand ça va pas, même quand il y est pour rien. Et il le sait ! Mais comme c’est un malin il la calme en lui offrant des fleurs… Oh, je viens de comprendre ! Ce sont des fleurs Elfiques qui font des chatouillis dans le bas-ventre !!!
Enfin bon. Vite que je grandisse pour faire mes propres choix. Parler l’Elfique c’est bien, ça fait travailler les méninge et moi j’adore ça me travailler les méninges. Mais quand je serais grande, j’inventerais un traducteur ! Ouais : ça serait super pratique tu trouve pas ?

Jour X, Année X, Veut devenir Alchimiste !

PSSSH PROUUF!


La veille, alors que les Hauts-Elfes semblaient se réjouir de l’enfantement royal prochain, Maitre toki se sentit quelque peu ridicule quand son illusion d’invisibilité cessa brusquement. Affairés autour de leur Reine, le peuple de Gwaedia réagissait à l’exact opposé de ce que le couple n’aurait jamais imaginé. Les temps changent, se raisonnait le futur papa.
Discrètement, il profita de l’agitation ambiante pour se faufiler vers les deux gardes retenant Ruberta, qui elle-même promenait Pile et Face au bout d’une laisse. Ces deux derniers gémissaient toujours lamentablement, jusqu’à ce que les gardes s’interrogent du regard et ne laissent les trois énergumènes sous la responsabilité de Maitre toki.

« Ah bon. Et c’est tout ? » – « Maîîître ! »
Puis les gardes se mirent à courir afin de rejoindre l’attroupement d’Elfes situés à coté de la fontaine.

_Je ne comprendrais jamais rien en ce peuple.
_Maître !! S’affolèrent toujours les gobelins comme si Maitre toki avait commis l’exploit de ne pas les avoir remarqués.
_Uh, uh ! Je ne sais pas comment je fais pour les supporter ces deux-là. Se plaignit faussement Ruberta.
_Vous devriez faire preuve d’un peu plus de discrétion Ruberta. Ici nous sommes en territoire inconnu. Et les réactions de ce peuple m’ont l’air très imprévisibles...
_Je serais aussi discrète qu’une autruche, la tête fièrement enfouie dans les profondeurs de la terre ferme ! Assura t-elle joyeusement en levant une patte solennelle.
_Oui... C’est bien ce qui m’inquiète. Vous pouvez me dire ce que font les jumeaux avec vous ? Je ne me souviens pas de vous avoir inviter au voyage les gars !
_C’est elle !
_C’est lui !
_On nous a obligé !! S’accordèrent-ils ensemble. Sauvez-nous par pitié !
_Suffit, suffit ! Caqueta Ruberta en tirant solidement sur ses laisses. Je pense qu’il vaudrait mieux les avoir à l’œil. Je vous promets de bien m’en occuper...
_BWAAAA !

Maitre toki étudia la question. Devait-il libérer les gobelins des plumes de Ruberta ? Il décida que non. Quitte à avoir trois excités du bocal sur les bras, autant faciliter leur surveillance en les gardant réunis.


Ce matin là, alors que pour d’autres, l’après-midi battait son plein, une louve à la crinière dorée chantait et remuait son corps dans les émois de ses songes. Maitre toki souriait dans son sommeil. L’Elfe gracieuse avançait vers lui avec la souplesse et le déhanché de la plus féline des créatures.
Une main à la peau douce caressa son visage détendu. Il émit un faible murmure -Sha...- puis ouvrit les yeux devant le regard clair et pourtant chaud de sa fiancée brune -...edia, se rattrapa t-il en simulant un bâillement exagéré. « Shaaaediaaa ! »
De sa moue la plus craquante, Maitre toki tenta de corrompre sa future épouse en la suppliant de rester encore au lit. Que nenni ! La Haute-Elfe ne l’entendait pas de cette oreille là ! Surtout quelle venait de lui apprendre qu’il restait encore trois jours de fêtes... Trois jours ?!
Maitre toki repensa à la chanteuse : « Mon pauvre corps ne va pas supporter le choc ! »


Quelque part, certainement en Célarawen, une autre personne s’étirait dans son lit comme un gros chat matinal. Elle frotta ses paupières lourdes et cligna trois fois des yeux. Quand la vision trouble du réveil se stabilisa à-peu-près, elle étudia la chambre dans laquelle elle se trouvait.
Ruberta avait parfois l’habitude de se lever dans des endroits incongrus dont sa mémoire défaillante ne lui permettait pas le moindre souvenir d’y avoir atterri. Bizarrement, elle se réveilla cette fois-ci dans un lit. Et plus étrange encore, cela ne la perturba pas plus que nécessaire ; car Ruberta n’y avait pas passé la nuit seule.
Elle rejeta le drap de soie et se découvrit nue en dessous. La vue de son corps d’homme la paralysa un instant. Elle ne s’y habituerait jamais ; elle qui incarnait la féminité même !
Quelques gémissements l’extirpèrent de sa torpeur. Elle balaya la chambre du regard en espérant trouver son amant. Les murs de pierres épaisses -caractéristiques des grandes tours- étaient recouvertes de tapisseries Elfique afin de donner à cet espace exiguë un certain coté chaleureux. La solide porte en bois et ses affreux verrous en acier faisant face au lit, trahissaient le donjon souterrain dans lequel elle se trouvait. En portant le regard à sa droite, Ruberta distingua une ombre familière derrière le paravent.

_Déja réveillé mon tendre cygne?

Pas de réponse, si ce n’était le dégoût des gobelins que Ruberta bâillonna et ligota sous le lit la veille au soir, afin de garder une certaine intimité avec son amant. Elle ne les voyait pas, mas les yeux larmoyants des gobelins étaient rougis par le traumatisme du lit s’agitant follement au dessus de leur tête pendant des heures d’ébats énergiques.
Ruberta arriva derrière le paravent pour ne découvrir suspendue qu’une robe sophistiquée appartenant à son homme. Soudain, la porte s’ouvrit. Croisant les jambes, s’enroulant les bras autour de la poitrine pour mieux dissimuler les attributs féminins qu’elle ne possédait pas, Ruberta se cacha en vitesse derrière le paravent.

_Oh, vous êtes donc là ? Dit-on en Elfique, mais Ruberta le parlait couramment depuis sa plus tendre enfance grâce à sa mère.
Désolé, nous vous cherchions partout.

Affolée comme jamais, Ruberta inspira si fort qu’elle manqua de s’étrangler. Le fushia lui monta au visage alors qu’elle se demandait comment sortir de ce pétrin. Sa relation devait absolument rester secrète !
Des bruits de pas l’avertirent que l’on s’approchait du paravent. Ruberta se risqua un coup d’œil à travers un jour séparant deux pans du paravent et vit ; non pas un, mais deux gardes avancer vers elle. « Encore eux ! » Son cœur bondit dans sa poitrine.

_Ecartez-vous ! Grogna t-elle d’une voix puissante et anormalement masculine. (L’un d’eux aperçu l’œil écarquillé de Ruberta les espionnant à travers la rainure, avant de le voir disparaître instantanément.) Que voulez-vous ? Continua t-elle en imitant son amant autant qu’elle le pouvait. Normalement on frappe avant d’entrer. Reculez ! Non, encore, reculez encore !
_Navré mon Seigneur, mais il s’agit d’une urgence. Les prisonniers son mourants. Enfin, plus que d’habitude dirons-nous...
_KEWOUAAA !

Le cri aigu qui venait de transpercer leurs tympans fit sursauter les deux gardes. Ruberta était sous le choc. Son amant retenait-il réellement des personnes en captivité ?

_Oui, c’est en effet très regrettable. S’ils meurent trop rapidement, tout est fichu. Devons-nous diminuer la cadence des tortures ?
_Des tortures ?!!

Ruberta s’empara d’une manche de la robe suspendue et la mordit jusqu’à s’en faire saigner les gencives, plutôt que de pousser l’un de ses cris hauts perchés qu’elle seule possédait le secret. Ces révélations l’insupportaient autant qu’elles la tétanisèrent d’effrois.
C’est alors qu’une idée abracadabrante lui traversa l’esprit. Elle devait absolument constater les horreurs qu’on lui relatait de ses propres yeux. « Sortez. »

_Mon Seigneur ?
_J’en ai pour un instant, attendez-moi dehors. Oust !
_Comme il vous plaira, très cher druide.

Ruberta compta jusqu’à dix avant d’émettre le moindre mouvement quand la porte claqua. Son petit cœur flamant rose battait à tout rompre. Jamais elle n’aurait imaginé son amant capable d’autant d’atrocités. Maladroitement, elle entreprit d’enfiler la robe du druide par-dessus ses propres affaires dont elle se vêtit juste avant.
Dans l’une des bourses imposantes de son amant -qui en d’autres circonstances auraient contenue toutes sortes de matériaux propres aux usages d’un druide- elle y enfoura ses propres affaires. Maquillage et hamac à plumes pour ne citer que ceux-là.
Face au miroir, Ruberta se peintura le visage de fond de teint puis baissa la capuche de sa robe devant son visage afin de dissimuler sa perruque rose. L’image que lui renvoyait son reflet lui donna presque l’impression de ressembler à un homme.
Elle sortit de la chambre, se laissant guider vers la cellule avec une boule au ventre insupportable.


Les trois jours de fêtes passèrent.
Ni le Druide, ni Ruberta, ni même les gobelins ne réapparurent pendant ce laps de temps. Maitre toki et Gwaedia avaient bien plus important en tête pour s’en soucier. Il planait un goût amer lors des festivités depuis la découverte macabre du couteau dans leur chambre. Ceci n’avait fait que raviver la flamme les poussant à se rendre si rapidement au royaume des Hauts-Elfes du sud. Personne n’avait oublié la trouvaille du combustible Eflique après l’incendie en Kaminoi, lors des fiançailles humaines des futurs époux.
Pas de doute : derrière les chants et la joie des Hauts-Elfe, se cachait quelque part le sourire hypocrite d’un ou plusieurs détracteurs sanguinaires. Et quand la Reine de Celarawen annonça qu’elle épouserait Maitre toki, les quatre jours de fêtes qu’ils venaient d’essuyer se prolongèrent à presque dix jours consécutifs. Bizarrement Sha…edia, ne refit jamais de prestation scénique.

Lors du dîner officiel des fiançailles, quelqu’un fit enfin l’extrême honneur de parler à Maitre toki dans sa propre langue. On lui demanda : Sauriez-vous dire quelque chose en Elfique?
Ce à quoi Maitre toki se remémora une leçon d’Atrebürh sur le bateau. Il s’exclama avec enthousiasme : « Lnédeh à tous ! ».
De grands yeux outrés lui lancèrent un millier de lames acérées. Lui qui pensait leur souhaiter un bon appétit, venait tout simplement de les insulter de crétins.
Mais un instant plus tard, cette remarque fut bien vite oubliée, comme si de part leur longévité consternante, les Hauts-Elfes s’épargnaient ainsi de très longs siècles de rancunes...

L’empoisonnement de Gwaedia, l’incendie, la réapparition de la lame brisée et l’agitation des Elfes noirs aux frontières de Celarawen... La tension était palpable. Elle grandissait exponentiellement à mesure où les jours passaient.
Avec tout ça, on aurait presque oublié le mariage en préparation !

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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:27

[quote name='Kyra' date='Friday 30/04/2010 à 19:52' post='122196']



Citation :
Cher journal,

Tu sais quoi ? Aujourd’hui je boude. J’ai beaucoup réfléchi ces temps-ci : je me demandais à quoi pouvait ressembler l’animal avec des plumes comme celle avec laquelle je te parle. Ça existe vraiment des oiseaux roses ? En tous cas, moi je n’en ai jamais vu et c’est pas faute d’avoir essayé.

Les flamants roses… Pff ! C’est comme l’histoire du furet cleptomane qui t’apporte des piécettes d’or sous l’oreiller quand tu perds une dent. Si c’était vrai alors pourquoi tous ces pauvres mendiants qui ont perdu les leurs par la famine sont toujours aussi pauvres ? Alors, alors ? Quoi, parce qu’ils n’ont pas la chance d’avoir un oreiller où la cacher ?
Hum…

Ça n’empêche que quand j’ai dit à mes parents que je voulais devenir un flamant rose par alchimie pour voir ce que ça faisait, ils m’ont interdit de sortir de ma chambre pour aller regarder les oiseaux des marécages. Ouais, comme si j’allais vraiment m’emplumer de la tête aux pieds et me balader sur une patte. C’est ridicule ! Je vois pas pourquoi ils sont si en colère d’un coup.
Bah. Toutes façons le rose c’est trop moche.

Jour X, Année X, je suis un phoenicopterus ruber…

Le ciel semblait perdre de sa grandeur quand l’éclat du soleil se retrouva prisonnier des nuages noirs. Comme un avertissement sur le châtiment qu’ils lui réservaient, les bourreaux du soleil s’enfonçaient sournoisement vers la terre.
Gwaedia leva un regard inquiet sur cette présence opaque. Les formes hargneuses du ciel menaçaient de comprimer la Reine comme un étau au centre d’une bataille entre les éléments. Trop de pression.

_C’est assez. Lâcha t-elle d’un soupir résigné.
_Mais Ma Reine, il est vital que vous choisissiez votre Terre pour lui prier Leurs bénédictions !

A travers la fenêtre aux lignes courbées de ses quartiers, Gwaedia ne quittait pas des yeux cet éclair blafard hésiter entre ciel et terre. Elle y voyait là une parfaite métaphore lui renvoyant son propre dilemme à la figure. La Reine souriait de cette ironie.

_Par Valar, vous en riez ? S’indignait son interlocutrice.
_Plus de deux cents ans… Répondit Gwaedia dans le vague. Plus de deux cents ans et je suis toujours aussi fascinée. La nature parait si influencée par nos sentiments les plus profonds. Ou bien serait-ce le contraire… Qu’en penses-tu Taléna ?

La scribe et Dame de compagnie de Gwaedia fit un pas vers Sa Reine qui lui tournait le dos. Elle posa une main amicale sur son épaule, consciente du choix délicat qui coupait Gwaedia en deux. D’un ton ferme mais néanmoins affectueux, Taléna insista à contre cœur : « Kaminoi ou Célarawen, Ma Reine. Il vous faut choisir... »

Une nouvelle hésitation étincelante déchira le ciel en colère.

_Il n’y a aucune échapa…
_Le Choix est déjà fait. Coupa Gwaedia.

Et le tonnerre gronda cette décision.


Qu’il pleuve au pays des Elfes, Maitre toki ne s’en serait jamais douté. C’était stupide. Ici plus qu’ailleurs il fallait bien se charger d’arroser tous ces arbres et cette végétation abondante.
Maitre toki leva les yeux dans l’attente de la pluie annoncée par l’orage. Sans vraiment comprendre pourquoi, l’arrivé d’un déluge lui rappela son royaume. Son royaume dans lequel sa fille l’attendait depuis presque deux mois. Sa fille qui lui manquait si fort…
Une fois encore il se sentit stupide, et cet Elfe arrogant ne manquait pas la moindre occasion de le lui rappeler.

_Que Valar me vienne en aide, ou qu’il m’achève… Supplia Atrebürh.
_Ce serait effectivement un soulagement pour tous les deux. Railla Maitre toki.
_Vous n’y mettez aucune volonté ! Je savais les humains limités, mais c’était bien avant vous connaître. Vous outrepassez les frontières connues de l’incompétence !
_Je me disais bien que vous finiriez par reconnaître votre talent inexistant d’enseignant. Je vous rappelle que lors de mes fiançailles vous m’avez fait insulter la table de bande de crétins au lieu de souhaiter simplement un bon appétit.
_Lnédeh. Cracha le druide.
_Voyez ? Vous recommencez… (Balayant le cours de la discussion d’un mouvement de bras résigné. ) Je suis conscient du dîner important de ce soir. Mais vous savez quoi ? Le jour du mariage je n’aurai qu’à me limiter d’ouvrir la bouche uniquement pour dire « oui » et manger vos salades…
_Des salades ?? Outrage ! S’emporta le druide. Vous insultez le respect culinaire et diététique de la civilisation Haute Elfique !

Maitre toki soupira. Il se demandait comment quelqu’un d’aussi insupportable avait pu mériter ses fonctions. Ce fut très certainement en cet instant précis qu’il pensa l’urgence d’avoir une petite discussion avec sa future épouse à ce sujet.

_Allez juste vous faire voir. Conclut simplement Maitre toki.

Il sourit puis quitta la bibliothèque comme un prince, non sans au préalable avoir évité le tronc d’un arbre - qui pour un humain n’avait vraiment rien à faire au centre d’une pièce.
A l’extérieur, Célarawen s’était vêtu d’un habit sombre et hautin. Un contraste évident avec la beauté chaleureuse de ces deux derniers mois. Si Maitre toki avait été un Elfe, sans doute aurait-il traduit le frisson qui grignotait sa peau comme le présage d’un danger éminent. Il tenait dans sa main le poignard empoisonné, mystérieusement réapparu un peu avant les fiançailles. Son retour improbable en était clairement une provocation. Depuis, il se torturait l’esprit afin de comprendre désespérément la signification de toute cette mascarade.
Qui avait donc tenté d’empoisonner Gwaedia ? Qui devait périr de cette lame pour avoir attenté à la vie de sa future épouse ? Maitre toki accéléra son pas pour rentrer se réchauffer dans le château auprès de Gwaedia. L’envie de la tenir dans ses bras redoublait d’intensité.

Epousant les formes aléatoires d’une falaise, l’édifice Elfique respectait toutes les traditions architecturales des Hauts-Elfe. Le château ne semblait pas être bâti sur la végétation comme une simple construction humaine. Les Elfes l'avaient façonné en complète harmonie avec la nature.
Le cœur de Maitre toki fit de nouveau accélérer son pas lorsqu’il reconnu la silhouette de Gwaedia dessinée au bord de sa fenêtre.

***

Dans l’obscurité totale, le silence morbide exerçait un pouvoir absolu. Pas le moindre tintement de chaînes. Mais Darlyssa serait incapable de dire depuis combien de temps le silence régnait. Ses poignets prisonniers la lançaient de nouveau, ce qui lui valu de regretter sa tentative de trouver une position un peu plus confortable.
« Une position confortable… » L’Elfe Noir en riait presque intérieurement. Elle sentait une présence chaude glisser le long de son avant-bras et sut qu’il s’agissait de sang. Darlyssa était complètement vidée de ses forces et cela faisait un moment qu’elle savait avoir puisé dans ses dernières réserves pour lancer son ultime appel de détresse envers son peuple. Mais ce qui l’inquiétait d’avantage était le silence pesant qui étouffait leur geôle. Elle priait pour que Sensei soit toujours en vie malgré sa respiration inaudible. Elle aurait tant voulu être capable de l’appeler, susciter une réaction quelle qu’elle soit lui prouvant qu’il tenait bon.
C’est alors que la douleur, la faim, la soif et la fatigue la firent sombrer une nouvelle fois dans l’inconscience.

Un rayon de lumière fulgurant lui brûla les yeux, même à travers ses paupières clauses. Crachant un juron, ses pieds à bout de force grattaient désespérément le sol comme pour fuir l’individu s’approchant d’eux. Sensei savait qu’il ne supporterait pas une torture de plus. Il ne désirait rien d’autre que de mourir en paix.
Son œil droit œil injecté de sang affichait la silhouette embrumée d’Atrebürh se penchant au dessus de lui. Il cligna des yeux frénétiquement. « Non. Pitié, non ! » La panique atteignit son paroxysme quand le druide s’accroupit face à lui. Sensei refusa de boire la substance présente dans la gourde en peau de cerf qu’on lui posa sur les lèvres, en vain. Il lui était impossible de résister à la pression exercée contre ses lèvres creusées par la sécheresse.
Ce qu’il pensait être du poison ne fut en réalité que de l’eau. Surprit, Sensei ne put retenir ses déglutitions effrénées du breuvage offert. Ces quelques gorgées d’eau suffirent à lui faire regagner un peu de précision à sa vue.
L’individu qui venait de lui sauver la vie portait bel et bien la robe du druide, mais quelque chose dans son visage dissimulé sous la capuche différait. Sensei en reconnu l’empathie.

_Vous… vous n’êtes pas lui. Bredouilla Sensei d’un souffle las. Vous…
_Chuuut. Allons, taisez-vous et reprenez des forces. Murmura tendrement une voix androgyne. Tenez, buvez le reste de cette gourde je vais m’occuper de votre amie. Vous avez fait des progrès. Aujourd’hui vous ouvrez les yeux.

Sensei leva la gourde autant que possible et but à une telle vitesse qu’il manquait de s’étrangler à chaque fois qu’il avalait de l’eau. Le mystérieux personnage bienfaiteur essayait tant bien que mal de faire boire Darlyssa, mais cette dernière ne donnait aucune réaction.

_Darlyssa ! Un cri sourd qui ne valait en rien à la profonde détresse de Sensei. Est-elle toujours en vie ? Dites-moi qu’elle est en vie !
_C’est le cas. Mais… Mademoiselle ? (Un silence)
_Darlyssa !
_Ne criez pas ! S’emporta l’inconnu d’une voix soudainement haut perchée. Elle ne vous entend pas, votre amie est sourde (puis en fixant son regard lointain qui ne suivait pas la gourde tourner sous son nez : ) et manifestement aveugle.

***

Elle n’avait pas bougé depuis qu’il l’avait aperçu à sa fenêtre. Il s’était glissé derrière elle sans faire le moindre bruit, mais l’ouïe aiguisée de la Reine en reconnue la proximité de ses pas. Gwaedia se laissa porter par l’étreinte de son homme et couvrit les mains qui caressaient son petit ventre rond de deux mois.

_Comment te sens-tu ? Murmura Maitre toki avant de déposer un baiser dans le cou de la future maman.
_Quand cesseras-tu de t’inquiéter pour moi ? Le taquina Gwaedia.
_Jamais.
_Ce qui est arrivé à la mère de Kyra ne m’arrivera point. Promit-elle.

La pluie abondante créait un rideau étincelant devant le couple qui se perdait dans cette beauté argentée.

_Qu’as-tu fait de ton instructeur Elfique ?
_Etait-ce réellement utile de gâcher un si beau moment ? Plaisanta Maitre toki. Ce druide est de plus en plus insupportable. Je ne sais pas comment tu as fait pour le tolérer tout ce temps !

Gwaedia émit un petit rire en resserrant l’étreinte que Maitre toki exerçait autour d’elle. « Il est l’un des plus amoureux de nos langues et coutumes. On ne trouve pas plus cultivé qu’Atrëburh en Célarawen… Même si c’est un drôle d’oiseau, je le reconnais. »
_Mais à ce point là c’en est du fanatisme ! Se moqua Maitre toki. Tu sais combien je déteste les fanatiques.
_Arrête un peu ! S’exclama joyeusement Gwaedia en se retournant vers lui. On dirait un grand gamin. En plus… C’est lui qui nous mariera !

Maitre toki la fit pivoter gentiment sur le coté « Un instant » puis se dirigea vers la fenêtre.

_Que se passe t-il ? S’inquiéta Gwaedia.
_Oh tu sais, rien de spécial… Je vais juste sauter me suicider!! Tu seras juste gentille de m’aider à remonter pour recommencer, si d’aventure je me serai loupé la première fois.
_D’accord.
_Eh !

Gwaedia et Maitre toki se perdirent dans une crise de fou rire. Très vite, la Reine Elfique parvint à brusquement regagner son sérieux.

_J’ai choisi tu sais.
_Le prénom de notre garçon ? C’est un peu tôt. Que penses-tu de…
_Il ne s’agit point de cela. (Il y eut un blanc ; un éclair à travers le rideau de pluie) Célarawen ou Kaminoi.

Gwaedia prononça quatre syllabes à l’oreille attentive de Maitre toki. Le tonnerre l’entendit malgré tout et se réveilla de nouveau.

_Si tel est ton choix, soupira Maitre toki, alors je le respecte. Je dois m’en aller.
_Mais attends ! S’affola Gwaedia. Tu ne peux point partir comme ça ! Et le Dîner de ce soir ?
_C’est que… j’ai une collection de Vieilles Pies à entretenir tu vois.
_Quand ce n’est point les bananes… Mais tu sais que nous devons être à deux pour sélectionner le meilleur de nos chefs respectifs.
_D’ailleurs en parlant de bananes…
_Point !
_A la ligne… (Maitre toki s’esquiva hors des quartiers de Gwaedia)
_Non, non, non ! S’écria t-elle en lui courant après. Toki, reviens !!

Amusé, et peut-être enchanté de la décision de sa future épouse, Maitre toki cavalait dans les couloirs sinueux –attention aux racines males placées- pour rédiger au plus vite ses invitations au mariage.
« Ni l’un ni l’autre » Lui avait-elle chuchoté à l’oreille. Cela sous-entendait une terre neutre à l’exacte distance entre Kaminoi et Célarawen. Le mariage se déroulerait là bas, sur le Mont Saint Nickel.

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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:28

[quote name='Kyra' date='Friday 14/05/2010 à 17:43' post='122388']


Citation :
Cher journal,

J’ai très mal à la tête depuis plusieurs jours. Si ça continue comme ça je vais finir par exploser comme une mauvaise expérience alchimique. Et BOUM le château !!!
Aie, c’est pas humain d’avoir aussi mal. J’ai l’impression qu’on est quinze là dedans.

Eh oh ! Vous m’entendez ? Pas de place pour vous ici ! C’est ma tête alors fichez le camp ou je fais tout péter !!



Oups…
Bin au moins ça défoule. Je devrai faire ça plus souvent. « Papa, maman, désolée d’avoir incendié ma chambre, c’était pas exprès ! »

Bon, après avoir réglé quelques incidents diplomatiques avec mes parents, je crois que j’ai réussi à me débarrasser de toutes les voix dans ma tête. J’espère qu’il n’en reste pas une planquée quelque part dans un recoin de mon esprit. La skimizophranie, skimizo-skizo truc, bin ça fait désordre.

Jour X, Année X, se sent pousser des plumes sur la tête !



Les premières saveurs de l’air frais chatouillant ses narines lui tirèrent une larme de bonheur. Lui qui pensait finir étouffé par l’air humide et confiné de la geôle, la fraîcheur de cette brise traversant l’interstice de la fenêtre lui conféra de nouvelles forces.
Sensei ouvrit les yeux. Les hurlements de son corps blessé insultaient le réveil de ses paupières. Ignorant la douleur il chercha Darlyssa du regard. Elle se trouvait là, juste à son coté, sereine et endormit sur un lit blanc aux courbes végétales. Un hale de lumière chaude recouvrait la peau de l’Elfe qui brillait comme un cierge invoquant les formes ombragées d’un couloir sans fond.
Oui, elle respirait. Et c’est en caressant timidement son visage d’ébène qu’il la réveilla. Il lui interdit d’ouvrir les yeux qu’il savait aveugles, l’assurant que le bandage les recouvrant n’était que pure précaution. Cependant, Sensei oubliait un détail. Darlyssa ne pouvait lui répondre ; ne pouvait l’entendre.
De petites voix lointaines s’élevèrent dans le silence. Elles provenaient de l’inter chambre de laquelle ils se trouvaient. Sensei se leva avec prudence, mais son corps lourd et meurtri semblait lutter contre cette mauvaise idée. Bravant ces interdictions, il parvint à avancer jusqu’à la porte pour y coller une oreille attentive.
Une dispute faisait rage entre deux voix opposées. L’une, grave et réfléchie, l’intonation cultivée et presque lyric. L’autre, agressive et haut perchée, bien que fragile et douloureuse.

« Trop loin, trop loin, trop loin. Répétait la voix aiguë insupportable. Tu es allé beaucoup trop loin !
- Tu sais aussi bien que moi qu’il n’y avait pas d’autres choix. Répondit la voix grave. Toute ma vie je n’ai fait que servir les intérêts de Ma Reine. Leur captivité était primordiale ! Par Valar, que t’as t-il prit de les libérer ?
- Il m’a prit que j’ai un cœur, moi. Ces pauvres gens n’ont rien demandé. Tu les as chassés dans les bois, et durant tout ce temps tu les torturais dans mon dos à des fins… Oh, mon tendre. Ce sont là les agissements d’un sombre despote ! Comment as-tu pu…
- Ne comprends-tu pas le danger que représentent les sang-mêlé pour Célarawen ?
- Mais regardes-nous ! Sommes-nous si différents toi et moi ? Obligés de cacher notre amour…
- Cela n’a rien à voir !
- Et Alaena, n’est-elle pas non plus ce que tu appelles un sang-mêlé ?
- Crois-moi, la décadente princesse d’Eliach, première descendante de la Reine, est la seule exception que nous pouvons tolérer. Toutes ces rumeurs sur sa dépendance envers le Faenir... Et elles sont fondées! Et les charmes de dépravée qu’elle utilise pour manipuler son prochain? Abjecte!
- Ton âme est si pure, mon amour… (Petite pause durant laquelle on n’entendit plus un son) Mais si sombre à la fois, que mon coeur et mon âme en sont déchirés en deux. »


Derrière une autre porte dans le couloir avoisinant, se déroulait une chamaillerie entre deux gobelins sournois. La folle emplumée semblait de plus en plus distraite ces derniers temps, ce qui avait permis aux jumeaux de trouver une échappatoire à son emprise. Pourtant, la curiosité l’emportant sur l’instinct de survie, Pile et Face se disputaient tour à tour le droit de l’espionner par le trou de la serrure.
Lorsque Pile en eut assez de porter son frère qui lui enfonçait un gros orteil purulent dans le gosier, il le tira pour le jeter à terre et bondit sur son crâne dans la foulée.
« A mon tour ! » Décida t-il.
L’espace d’un instant, Pile parvint à distinguer les plumes de Ruberta qui tournait le dos à la porte. Son visage recula légèrement, dévoilant celui d’Atrebürh qu’elle venait d’embrasser.
« Mais si sombre à la fois, que mon coeur et mon âme en sont déchirés en deux.. »
Le visage empli d’un dégoût soudain, Atrebürh lança un regard de vipère transcendant qui parvint jusqu’à celui du gobelin. Cette expression l’effraya à tel point qu’il préféra se laisser tomber en arrière avant de commencer à gémir.
_Il m’a vu, est-ce qu’il m’a vu ? (Un fracas sourd se fit entendre derrière la porte)
_‘Faut pas qu’on reste là ! Ordonna Face en brutalisant son frère pour le calmer. Retrouvons le Maître !
_Retrouvons-le !

Lorsque les jumeaux gobelins s’enfuirent dans le couloir, Sensei venait d’enfoncer la porte de l’inter chambre. Ruberta poussa un cri de pie devant son miroir maquillé d’une trace rose et se retourna en sursaut. Ses yeux tristes trahissaient les larmes qu’elle tentait d’essuyer en se démaquillant.

_Où est-il ?

Même à ses oreilles, la voix de Sensei parut trop fatiguée comparée aux menaces que ses mots devaient suggérer. Ruberta plongea son visage démaquillé dans ses mains et sanglota comme l’agonie d’une grenouille. Un pleur indescriptible.

_J’ai bien reconnu sa voix, vous parliez avec lui ! Où se cache t-il ?
_Il est parti, fichez-moi la paix, je pleurs ! Je meurs ! Je suis brisée !

Devant l’état dépressif de celle qui les sauva d’une mort certaine, Darlyssa et lui, Sensei examina rapidement l’inter chambre. Alerté par l’ouverture de la fenêtre, il se précipita à son rebord et passa la tête en dehors.

_Non ! Supplia la femme rose esseulée. Je vous en prie, ne le cherchez pas, il y a du bon en lui, je vous en prie.
_Je ne lui laisserai aucune longueur d’avance supplémentaire. Répondit Sensei.

Au même instant, Darlyssa apparut en divinité incandescente, brillant de mile feux comme si un soleil avait élu domicile sous sa peau noire. Elle avait arraché le bandage de ses yeux mais ne parvenait à distinguer que quelques formes incertaines.

_Sensei ? (Elle flancha mais il la rattrapa de justesse) Ils sont là…

Ses forces vivifiées par l’adrénaline, Sensei épaula l’Elfe noire jusqu’à la fenêtre. Les anciens captifs disparurent alors dans les falaises des fondations du château.

Ruberta était désemparée. Elle parvint à sécher ses larmes et termina de se démaquiller complètement. De colère elle jeta le hamac à plumes qui recouvrait ses épaules, divulguant ainsi la robe de druide qu’elle portait encore. Elle était décidée. Il fallait absolument parler à la Reine avant que l’irréparable ne se produise, même si elle savait au plus profond d’elle-même qu’il ne la laisserait pas faire. Mais qui pouvait dire ce dont étaient capables ces deux jeunes gens livrés à eux même, quelque part en Célarawen ?
« Ils sont là… » Mais qui, était là ?
Sur cette dernière pensée, Ruberta décoiffa sa perruque afin de soulager la montée d’une soudaine migraine, et Atrebürh se révéla.


Aux premières lueurs du crépuscule, la table du Dîner de dégustation fut enfin dressée.
Du côté buffet Elfique : Kalami’tidjèn, traiteur de renom en Célarawen. Les longs cheveux d’or aux reflets cuivrés de cette femme encadraient un visage aussi raffiné que ses qualités culinaires reconnues.
Du côté buffet Humain : Hal Kappon, chef cuisinier talentueux de Kaminoi. Derrière ces faux airs de crapule, ces petits yeux ronds et cette moustache noire recourbée, se dissimulait un homme généreux des plus talentueux.
Encadrant la table ronde comme les deux faces d’un triangle, chaque buffet regorgeait de spécialités des deux peuples. Gwaedia avait organisé ce repas dégustatif dans le but de proposer aux invités du mariage un assortiment aussi métis que ce dernier. Ce soir, elle et Maitre toki sélectionneraient le meilleur des deux chefs en compétition qui déjà se lançaient des regards électriques. Le dîner s’annonçait mémorable, d’autant plus que les fiancés avaient décidé de réunir deux invités particuliers avec pour folle idée de démasquer leur liaison intime, jusque là tenue secrète.

Si Pile et Face avaient vu juste, Maitre toki savait qu’il tiendrait là une mine d’or d’arguments chocs lui permettant de dévaloriser le druide pour lui faire ravaler tous ses rabaissements impétueux.
« Un druide Haut-Elfique xénophobe s’accouplant avec un travesti flamant rose exubérant… Du jamais vu ! »
Cette pensée déchirait les joues de Maitre toki d’un sourire jubilatoire lorsqu’il tira la chaise de Gwaedia avec galanterie. L’expression de la Reine se voulait plus neutre, mieux contenue. Une question démangeait tout de même l’illusionniste qui ne parvenait pas à dissimuler son excitation.

_Crois-tu qu’Atrebürh soit vraiment au courant pour Ruberta ?
_De quoi donc ? Feignit Gwaedia comme une Reine qui se respecte.
_Mais c’est un homme, par les Déesses !
_Je le sais très bien, par Valar ! Contra Gwaedia. Tais-toi. Je ne veux surtout point imaginer leurs… (Ils échangèrent un regard lourd de sous-entendus ; lorsque Maitre toki en tomba mollement sur sa chaise)
_Trop tard…

_Ma, qué vous êtes jolis tous lé deux ! Retentit une forte voix.

Comme à son habitude, Hal Kappon s’exclamait sans aucune retenu de son accent chanté inimitable. Kalami’tidjèn haussa un sourcil. Ce fut la seule expression que Maitre toki perçut sur le visage du traiteur Elfique. Elle se lança dans un long discours dans sa langue natale, visiblement à l’attention de la Reine.

_ Xia mac teaiq bieccahd juic uvvnen my dnyhxiemmedé ti cemahla, ad myeccan judna cykacca juic sinsinan à cy kieca my saemmaina cémaldeuh ta huinnedina buccepma buin judna syneyka, Sy Naeha.
_Sanle. Remercia Gwaedia en inclinant la tête à son tour. Mais ce soir, parlons le langage commun pour que tout le monde puisse nous comprendre. (Puis à l’attention de Maitre toki) Kalami’tidjèn nous souhaitait de faire le meilleur choix possible dans notre sélection.

Les chefs cuisiniers se tenaient entre leur buffet respectif et la table des fiancés qui n’était autre qu’un magnifique tronc de chêne ancien. Un doux feuillage aux fleurs blanches le recouvrait en guise de nappe.
Maitre toki ne s’y méprenait pas : aucune menuiserie n’avait permis la confection de cette œuvre. L’arbre avait poussé de lui-même sous la forme d’un champignon plat, ses fines branches poussant ça et là entre les plats et les couverts.

Sous la table, une autre branche – plus discrète, mais plus incommode – se tortilla dangereusement vers l’entrejambe de l’illusionniste. Il sursauta avant de se figer comme une statue de marbre. Seule une petite veine pulsait dans son cou le martèlement de ses pulsations cardiaque.
Couper cette branche le démangeait autant que les feuilles le chatouillaient, mais avec ce blasphème, Maitre toki risquerait bien trop gros. Ses yeux rivés sur Gwaedia imploraient une aide silencieuse. En guise de réponse, la Haute-Elfe ne parvint pas à retenir un sourire moqueur enjoliver son regard provocateur.

_Toi ? Souffla Maitre toki comme il venait de comprendre.

C’est alors qu’Atrebürh choisit ce moment précis pour débarquer dans la salle...
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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:29

[quote name='Kyra' date='Wednesday 02/06/2010 à 20:38' post='122586']



Citation :
Cher journal,

Rester concentrée à l’école devient de plus en plus difficile. Toute les voix dans ma tête ne se sont pas tues, un peu comme si quelqu’un essayait de rentrer à l’intérieur. Sauf que ma tête c’est pas un gîte pour esprits tordus ! D’habitude mes prémonitions ne sont pas aussi violentes. Je crois que quelqu’un essaye de forcer ma barrière de protection psychique. Enfin, quelque chose comme ça. Je ne suis pas experte en bizarreries de la tête. Je devrais en parler à mes parents non ?
Non.

C’est quand même bizarre. Je ne me souvenais pas d’avoir rangé mes affaires dans une bourse énorme avant de partir à l’école. C’est même pas à moi ce qu’il y a là dedans. Des herbes, des racines, de la menthe à mâcher… Incompréhensible.

Jour X, Année X, A besoin d’un médecin de la tête.


Rien dans la démarche du druide ne trahissait la profonde détresse qui le malmenait de l’intérieur. Ce n’était plus qu’une question de temps avant que Sa Reine ne découvre les atrocités qu’il avait commises à son insu. Il savait parfaitement avoir agis pour son bien, mais la Reine était trop aveuglée par le bouffon qu’elle était sur le point d’épouser. Pire que tout, Atrebürh était terrorisé par l’idée de perdre toute l’estime et le respect que lui vouait Gwaedia jusqu’à ce jour. C’était là sa plus grande crainte, mis à part peut-être sa récente phobie envers les flamants roses. Car il en était un qui s’apprêtait très certainement à dénoncer ses sombres secrets.
Atrebürh s’arrêta devant la table du couple et s’inclina un peu trop bas pour saluer la Reine.

_Vous pouvez vous assoire. L’enjoignit Gwaedia, un œil coquin rivé sur l’embarras de son fiancé assis en face d’elle.
_M’inviter à votre table est des plus généreux de votre part, Ma Reine.

Maitre toki poussa un léger hoquet de surprise comme il tachait de se libérer discrètement des caresses indésirables qui le chatouillaient sous la table. « Oui, généreux, c’est très généreux ! » Espérait-il se camoufler du regard sombre que lui lançait le druide.

_Et bien il ne manque plus que Ruberta. Annonça Gwaedia tout en guettant la réaction du druide.

Piqué au vif, celui-ci se raidit sur son siège comme un félins aux aguets alors qu’il venait tout juste de s’assoire.

_C’est son idée. Accusa Maître toki, la tête baissée pour tâcher de se concentrer.
_Allons Atrebürh, ne faites pas cette tête. Ruberta est une… un être tout à fait charmant, vous savez ?
_Comment le saurais-je ? Contra le druide sur la défensive.
_Il est vrai que bizarrement, on ne vous a jamais vu ensemble quand on y réfléchi. (Le teint du druide était livide. Pas blanc comme un Elfe : livide.)
_Vous avez mauvaise mine. S’inquiéta Gwaedia. Allez vite vous rafraîchir avant que Ruberta ne nous rejoigne.

Le druide s’exécuta d’un bond et disparut derrière une porte. Les chefs cuisiniers désespéraient de servir un jour les saveurs qu’ils avaient préparées. Ce fut Hal Kappon qui perdit patience le premier.

_Ma, Mais qué sé passé t-il ? Mes pasta' vont étés trop cuité !
_Qu’est-ce que tu fais ! S’exclama Maitre toki à voix basse.
_Je ne voudrais point qu’Atrebürh se mette à vomir…
_Non, je parle de ça. (Il indiqua la nappe volage des deux index)
_Oh. Désolée, désolée. C’est comique mais je ne contrôle absolument rien. L’arbre réagit à ma condition de femme enceinte et je crois qu’il a reconnu le père.
_Je vois… (Il sursauta comme une idée affreuse lui sauta à la figure.) Et pourquoi Atrebürh est devenu tout bizarre en mettant les pieds sous la table ??
_Idiot vas, que vas-tu imaginer ? L’arbre le laisse tranquille ! C’est à cause de Ruberta bien sur. Tes gobelins ont apparemment vu juste.

Une deuxième branche remonta le long de la jambe de Maitre toki qui la gifla impunément d’un coup sec. Génial : la première appelait déjà des renforts et le dîner n’avait même pas encore commencé.

_Me voici, mes canaris ! Tonna une voix sans pareille.

Accompagnée par la fanfare de ses talons hauts, Ruberta se pressait comme un dindon doté d’échasses. A bout de souffle, elle réajusta son hamac à plumes roses qu’elle utilisait comme un châle et prit place à table.

_Je suis vraiment navrée de ce retard, la toilette d’une Dame est toujours pleine de rebondissements ! Enfin, vous-même ma chère, savez de quoi je parle. (Clin d’œil à l’intention de Maitre toki.) Entre femmes on se comprend.

Ruberta partit à caqueter d’un rire haut et fort comme elle seule en avait le secret. Maitre toki s’imagina qu’elle se trouvait drôle, mais cette joyeuse bonne humeur n’allait pas durer.

_Vous êtes assise à la place du druide. L’informa poliment Maitre toki.
_Oh ? Oh oui bien sur je… (Ruberta fit mine de se lever puis se figea dans son mouvement, les fesses à demi levées de sa chaise.) Mon druide?? Quel druide ?
_Je me suis permise d’inviter Atrebürh à notre séance de dégustation. Précisa Gwaedia. Votre druide ?
_HA HA HA ! Ricana Ruberta apparemment mal à l’aise. Il est là ? Où est-il ? (Regard à gauche ; regard à droite.) Gwaedia, il me faut vous avertir de quelque chose de très important ...
_Et bien allez-y. Encouragea la Reine comme elle se doutait de la révélation coquine qui allait suivre. Je vous écoute Ruberta.
_ Crête de pan ! Jura cette dernière en se massant la tempe droite de la main gauche. La migraine revient! Oh oh... Excusez-moi, on me vole ma chaussure.

Ruberta glissa sous la table.
Ne voulant pas qu’elle le surprenne à se débattre avec les branches, Maitre toki se leva précipitamment de sa chaise et se pencha en avant pour parler discrètement à sa future épouse. Gwaedia s’inclina pour également s’approcher de lui.

_Il faut vraiment faire quelque chose avec cette… nappe. Chuchota Maitre toki.
_Je te l’ai dis, je ne peux rien y faire ! Croise les jambes et fais-toi discret.
_Très drôle.

Le couple s’éloigna l’un de l’autre, révélant Atrebürh assis face à la place qui lui était normalement destinée. Il regardait droit devant lui sans bouger. Ahuri de le voir de ce coté-ci de la table et ne l’ayant ni vu, ni entendu revenir, Maitre toki se demanda s’il n’avait pas surpris leur conversation.

_Mais comment avez-vous atterri là ? Demanda t-il d’un air béa.
_Je me suis assis. Répondit simplement Atrebürh en réajustant la sangle de son énorme bourse de druide.
_J’imagine…
_Vous vous en sortez Ruberta ? Interrogea Gwaedia dans le vide en s’inquiétant de ne pas la voir revenir.
_ A qui parlez vous ? Trembla le druide.
_Ruberta recherche sa chaussure égarée sous la table. Vous êtes assis sur son siège, vous allez la gêner.
_Permettez que je retourne à ma place. (Le druide se laissa doucement glisser sur son dossier).
_Enfin, faites le tour, par les Déesses !
_A deux nous irons plus vite pour trouver la…

Atrhebürh ne termina pas sa phrase : lui et sa bourse avaient déjà disparu sous les branches. Gwaedia et Maitre toki échangèrent un regard indescriptiblement effaré.

_Calboné les kablones ! Jura Hal Kappon de son côté. Tséh ! Tout lé monde est là on pé servir lé dîner. Yé né pé plou zattendre.
_Victooire ! (Ruberta brandissait son trophée pointu à bout de bras quand elle réapparut là où le druide venait de disparaître) Enfin cette maudite chaussure ! Ouf, je commençais à manquer d’air là-dessous.
_Mais que faites-vous tous sous la table ? Interrogea Maitre toki qui sentait une troisième présence se tortiller autour de sa cheville.
_Et vous ? Insinua Ruberta en le regardant droit dans les yeux.
_Moi ? Mais je… suis une victime
_Ruberta, votre châle à plumes ? Interrompit Gwaedia pendant que Hal Kappon s’approchait avec un plateau de nourriture.
_Mais oui, vous avez raison ! Confirma Ruberta. Une partie semble accrochée quelque part, je vais le chercher.
_Ça recommence.

Une fois de plus, le couple se retrouva seul à table pendant que les deux amants cachés se débattaient avec la frondaison. Mais soudainement, Maitre toki s’alarma bien plus du contenu de son assiette que des deux compères excentriques.

_Et les Pasta’ pour mésieu toké ! Oune touté nouvélle récette que yé viens d’inventer pour vous.
_Une purée ?
_Sans pommé dé terre, qué lé Pasta’ ! Régalez-vous.

Septique, Maitre toki s’interrogea sur le meilleur moyen de se débarrasser de ce plat à la consistance plus que douteuse. Il fut interrompu dans sa réflexion lorsque le druide regagna sa place. Le souffle court, ce dernier semblait vouloir se soulager d’une migraine comme il se massait la tempe gauche avec la main droite.

_Enfin vous revoilà Atrhebürh. Vous allez nous dire ce qu’il se passe ? (Parler plutôt que manger : telle était la stratégie adoptée par Maitre toki pour de gagner du temps).
_Désolé, je me suis perdu là dessous… Improvisa le druide.

Une réponse qui laissa songeur.

_Bon allez, c’est fini Atrebürh. Perdit patience l’illusionniste. Avouez. Nous savons déjà tout.
_Tout ?!
_D’ailleurs faites attentions, vous vous êtes accroché aux plumes de Ruberta. Remarqua Gwaedia.
_Voici pour vous Ma Reine. Interrompit Kalami’tidjèn.
C’était à son tour de partir à l’assaut dans l’espoir de gagner les faveurs de Gwaedia. Ses yeux visaient la mixture pâteuse que Maitre toki refusait de goûter.

_Un assortiment nutritif d’herbes acidulées prévenant des indigestions.
_Ave’ des haricots farcis pour adoucir lé acides dé vos herbes. Contra subitement Hal Kappon en servant Gwaedia.
_Sans oublier le gingembre de nos cultures traditionnelles pour anesthésier vos papilles de cette farce… Renchérissait Kalami’tidjèn, dont le double sens de ses mots n’avait échappé à personne.
Le tout formait une recette des plus détonantes.

_Et vous n’auriez rien prévu de plus comestible ?

Le fiasco vers lequel le dîner prenait tournure inquiétait visiblement aussi bien Maitre toki que sa fiancée

_Nous avons du vin.
_Nous avons du Faenir.
_Deux pichets de chaque pour moi.

C’était Atrebürh qui venait de se commander un remède à ses maux de tête. Kalami’tidjèn lui servit le Faenir tandis que Hal Kappon s’occupait du vin. Le druide s’enfila deux pichets d’une seule traite.
On tira sur le hamac à plumes accroché à lui, et Atrebürh s’enfila les deux derniers. « Excu-cu-sez… » Il tomba de sa chaise et roula sous la table.
Ruberta n’était toujours pas réapparue. Aussi, Maitre toki et Gwaedia se penchèrent encore l’un vers l’autre pour discuter à voix basse.

_Je n’ai jamais vu mon druide dans cet état. S’inquiétait la Reine.
_Moi aussi il faudrait que je sois dans un état d’ivresse avancé pour pouvoir…
_Mais que font-ils donc sous ce bidyeh d’arbre !!
_Des horreurs je le crains.
_Il faut vraiment faire quelque chose. Nous n’aurions jamais dû les réunir, c’était une grave erreur.
_C'était ton idée. Rappela Maitre toki.

En cet instant précis, les deux couples débattaient secrètement l’un envers l’autre. Le premier sur les cochonneries que devaient commettre le second sous leur nez ; le second sur les soupçons que devaient s’échanger le premier au dessus de leur tête.

_Inconsciente, ils savent déjà tout !
_Pas encore, mais si tu ne leur avoue pas tes crimes, c’est moi qui le ferai !

_A ton avis, c’est vraiment Ruberta qui fait la femme ?
_TOKI ! *petite pause, puis :* Pourquoi, tu crois qu’ils intervertissent les rôles ?

_Je ne te laisserai jamais faire une chose pareille. Tu n’as pas le droit !
_Comme tu n’avais pas le droit de torturer ces gens. Maintenant ils sont dehors et j’ai peur que quelque chose de terrible ne se produise.

_C’est juste dégoûtant.
_Je ne veux point imaginer, il faut les faire sortir. Vas-y toi !

_Mon plan est encore en marche, tu n’as fait que précipiter l’inévitable. Tu as achevé mon travail. Que tu le veuille où non, tu es avec moi. Tu l’as toujours été.
_Suffit, Atrebürh ! Je vais tout leur avouer. Et je vais nous dénoncer.

_Je parlais de la nourriture de Kappon… Je ne peux vraiment pas manger ça.
_Fais un effort, on ne refuse pas la nourriture d’un chef !
Hum. Je me sens bizarre d’un coup.


_Jamais tu m’entends ! Maintenant disparais, et ne reviens plus…Je ne veux plus t’entendre.
_...

_Toki, il y a un problème. Mon ventre…

Atrebürh resurgit brutalement de sous la végétation, mais il y avait quelque chose de dérangeant dans son regard. Il semblait hanté par un esprit contre lequel il lutait de toutes ses forces.

_Atrebürh ? Se risqua prudemment Maitre toki.
_Pourquoi portez-vous les habits de Ruberta ? Continua Gwaedia.
_C’est bien du rouge à lèvre que je vois ?

Le druide tourna sa tête habillée d’un haut chapeau à plumes de flamant roses, vers la Reine de Célarawen. Tout d’abord il ne prononça aucun mot, se contentant d’afficher un sourire jovial qui ne lui appartenait pas. Maitre toki tenta de déchiffrer les trace d’une illusion lorsqu’il reconnu le sourire de Ruberta sur le visage d’Atrebürh.

_Elle est partie ! Se réjouissait-il avec le sourire de son amante. Puis il se mit à chantonner : Elle est partie et ne reviendra pas ! Elle est partie et ne reviendra pas ! Hi hi hi hi !!
_Par Valar… (Gwaedia n’en croyait pas ses yeux) Atrebürh, seriez-vous ivre ?

Maitre toki fit basculer son siège en arrière lorsqu’il se releva d’un bond alerte. Sans quitter le druide du regard, il tendit un bras vers Gwaedia pour l’encourager à venir le rejoindre.

_Hi hi hi hi hi hi hi hi !

Atrebürh était hilare. Toute raison semblait l’avoir abandonné, et pourtant il n’était pas ivre. Il demeura assis, les yeux fous s’entrechoquant dans leurs orbites alors qu’il mangeait tranquillement le reste du plat indigeste de Maitre toki. Le druide arborait toujours le sourire radieux de Ruberta quand les portes s’ouvrirent avec fracas.

On aurait pu croire à une apparition céleste tant la lumière acerbe les agressait. Au centre de cette illumination incandescente, se tenait la silhouette mince d’un Elfe qui tendait un doigt accusateur en direction du druide. A ce commandement, une dizaine d’Elfes noirs armés se précipitèrent dans la salle. Ils hurlaient en coeur le nom de leur princesse.

« Pour Darlyssa ! »

Derrière elle : le crépitement d’un feu en Célarawen.

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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:30

[quote name='Kyra' date='Saturday 04/09/2010 à 00' post='123334']



La souffrance de Darlyssa ne s’estompait pas. Si Sensei ne l’aurait pas aidée à franchir les obstacles depuis leur fuite, jamais les anciens captifs ne seraient parvenus à atteindre les frontières de Celarawen. C’était là que l’armée des Elfes Noirs guettait, se demandant si leur princesse était encore en vie.

La fatigue alimentée par la privation d’eau et de nourriture avait plongé Darlyssa dans un coma, rompant ainsi toute connexion avec les siens et l’alerte mentale qu’elle leur lançait depuis plusieurs mois. Morte, ce signal de détresse aurait connu le même sort.
Toute tension retombée, Darlyssa, entourée de plusieurs vagues d’Elfes Noirs, recouvrait ses forces grâce à leur contact. Bientôt elle retrouva l’usage de ses yeux ambrés, mais la souffrance de Darlyssa ne s’estompait pas.

A l’écart, Sensei assistait à la scène en pensant à son double. Se pouvait-il que Maitre toki et Gwaedia aient eu vent des tortures engendrées par cet Elfe dégénéré ? Le bain de foule auquel se livrait Darlyssa finirait bientôt par la remettre entièrement sur pieds, mais la princesse ignorait tout des liens qu’entretenait Sensei avec Celarawen.
C’est alors que les forces de Darlyssa atteignirent leur paroxysme. Se retirant d’une seule révérence comme la mer glisse autour du rocher, ses sujets s’écartèrent de la boule de lumière qu’elle était devenue.

_Si tu retourne là bas avec l’intention de te venger, tu joueras le jeu de celui qui nous a séquestré. Exposa Sensei avant de continuer : Laisse-moi parler à ces gens. Je connais la Reine de Celarawen, elle m’accordera audience et fera justice.
_Une princesse en colère ne demande pas audience. Elle avance la tête haute et obtient ce que de droit.
_Darlyssa, j’ai toutes les raisons de penser que notre bourreau a agit dans l’ombre de sa Reine.
_Les Hauts-Efles et les Elfes Noirs ne sont pas fais pour discuter. Trancha l’Elfe Noir en colère. Et même si cette Reine est assez sotte pour ne pas voir ce qu’il se passe sur ses propres terres, la punition sera toute aussi méritée.
La voix de la princesse tonna un ordre qui déclencha l’invocation d’un brasier prêt à pénétrer dans le domaine de ses ennemis. « Allumez les torches ! »

A la nuit tombée, le feu crépitait en Celarawen.


La souffrance de Gwaedia ne s’estompait pas. Si Maitre toki ne la soutenait pas, jamais il ne lui aurait été possible de tenir sur ses jambes flageolantes. Les mains posées sur son ventre douloureux, la Reine ne pouvait s’empêcher de grimacer alors que les Elfes Noirs se précipitaient dans la salle.

_Le bébé ? S’inquiétait Maitre toki.
_Ça ira. Il ressent la douleur de Celarawen lui aussi, et je les ressens tous les deux.

Maitre toki reporta son attention en direction de l’Elfe Noire incandescente se tenant sur le seuil de la double porte. Il n’avait pas remué le petit doigt, que déjà la garde Haute-Elfique s’était déployée face à leurs agresseurs, de telle sorte qu’ils créaient un barrage entre les Elfes Noirs et Leur Reine. Face au danger imminent, Maitre toki jura comme il ne portait aucune arme sur lui.

_Cet homme que vous protégez est mon prisonnier. Décréta la femme éblouissante de lumière. Je suis Darlyssa Hel’Agane, princesse de Ker’Agane. Vous serrez épargnés en remerciement de votre coopération.
_ Je suis Gwaedia Erahéniel, Reine de Celarawen. Je ne vous donnerai personne. Faites demi-tour sur le champ, ou mourrez.

Face à l’impasse diplomatique qui se présentait, quelqu’un qui n’avait rien à faire au milieu d’une altercation entre deux Elfes s’interposa. Le pauvre ne savait pas dans quoi il risquait de s’embarquer, cet humain…

_Bon, pouce quoi.

Darlyssa porta un regard mauvais sur l’auteur de cette réplique déconcertante. Sa ressemblance avec Sensei la désarçonna. Le visage de cet homme possédait certes des traits un peu plus marqués, mais mis à part une petite différence d’age, ils restaient les mêmes.
C’est alors que coupée dans sa réflexion, elle découvrit Atrëburh se rouler sur le sol au pied d’une table végétale, répétant à tue-tête une phrase qui lui inspirait tant d’hilarité :
« Pouce pousse le coup de pouce ! Hi hi hi hi hi ! »

_Ainsi, la raison s’est évertuée à quitter cet individu corrompu par la déchéance. Commenta Darlyssa .Comme je la comprends.

L’Elfe Noire fit un pas vers l’avant. Un pas de trop sans doute, car c’est à ce signal hostile que la garde rapprochée de Gwaedia décida d’encercler le cou de Darlyssa par la pointe de leurs épées. La lumière blafarde émanant de sa peau d’ébène s’affola, redoublant d’intensité sur le reflet des lames qui l’entouraient tel un collier sadomasochiste.
A l’horizon, à travers l’encadrement de la double porte, Gwaedia perçue l’esquisse de l’incendie ravageant son royaume malgré l’invocation du mirage blanc. Le feu crépitait toujours, mais lorsque la lumière commandée par Darlyssa retomba, la Reine relâcha un souffle qu’elle ne savait pas avoir retenu. Le feu en question ne brûlait que les torches brandies des Elfes Noirs.

_Pour le moment… Semblait répondre Maitre toki à ses pensées.

L’illusionniste n’avait en réalité pas terminé sa phrase que Darlyssa venait de disparaître derrière lui lorsqu’il recouvra la vue. Comme les Hauts Elfes eurent le temps de se séparer, pour à la fois bloquer les issues et protéger Leur Reine, Maitre toki en déduisit que ces gens savaient contourner un certain degré d’éblouissement que ses yeux humains ne pouvaient supporter.

Elle se tenait là, penchée tendrement au dessus d’Atrëburh comme une mère affectueuse sur le berceau de son enfant. Le druide ne cessait de piailler, de gémir comme un bébé apeuré par le monstre tapis sous son lit. Mais le monstre était sorti de sa cachette et le regardait droit dans les yeux. Ses lèvres se mirent à remuer, et une voix étonnamment chaude et douce caressa les tympans de Ruberta.

_Mon petit druide aurait-il perdu la tête ?
_Non, ce n’est pas moi ! Je vous jure que ce n’est pas moi !

Pieds et jambes d’Atrëburh glissèrent frénétiquement sur le sol alors que la voix de Ruberta suppliait l’Elfe Noire.

_Pathétique ! Gronda Darlyssa devant tant d’apitoiement. Je ne te pensais pas si…(elle chercha ses mots puis lança à la cantonade : ) Quelqu’un aurait-il un mot capable de qualifier la lâcheté de cette loque ? Même moi, malgré toutes les tortures subies, je ne t’ai jamais donné le plaisir de verser autre que des gouttes de sueur. Et regarde toi…

_A moi la Garde ! Hurla Atrëburh. On nous attaque ! Protégez la Reine !
_Silence ! Ordonna Darlyssa, mais le druide semblait en proie à un conflit mental des plus inquiétants.
Celui-ci trouva le regard de Sa Reine qui exprimait tant d’incompréhension que ni elle, ni personne, n’osa esquisser le moindre mouvement. La démonstration d’une folie ravageuse figea tous les occupants de la salle.

_Ils ont attaqué notre convoi. Souvenez-vous, en sortant de Kaminoi ! Et maintenant regardez, ils nous envahissent ! (Il pointa Maitre toki du doigt) Lui… C’est lui qui les a mené jusqu’à nous. Capturez le ! Capturez-les tous ! Enfermez les étrangers ! Protégez la Reine ! Qu’on les saigne, qu’on les brûle comme ils brûlent nos terres ! Celarawen est en feu ! Coupez-lui la têêête !
_A-ssez ! Le gifla Darlyssa.

Pour autant, cela n’arrêta nullement les idées paranoïaques du druide, mais les Elfes Noirs étaient venus pour lui. Tant que Celarawen ne montrait aucun signe d’agression supplémentaire, le domaine des Hauts Elfes ne risquait plutôt rien.

_Tuez l’humain ! Répétait le druide dans son délire. Tuez les tous ! Protégez la Reine !

Des larmes de désespoir coulaient sur ses joues tremblantes. Ces larmes n’avaient rien à faire là, simplement parce qu’elles ne lui appartenaient pas. Ruberta, piégée dans ce corps et son âme maudite, pleurait de tout son être en cherchant un moyen d’évacuer la folie de son hôte. Il fallait qu’elle reprenne le contrôle. Il le fallait absolument.
Le spectacle inconcevable qui suivit paralysa les témoins de la scène : Atrëburh métamorphosé en Ruberta.

_Mon amour, m’entends-tu ? C’est moi, je suis là. Calme-toi, tout va bien à présent. C’est fini.


Adossée au buffet d’Hal Kappon, Ruberta ne trouva pas la force de se relever. Elle sentait Atrëburh luter en elle pour revenir, mais elle redoublait d’effort pour ne lui accorder qu’un droit de réponse. Lors de chaque métamorphose, on parvenait à distinguer les changements physiques subtils entre l’apparition de chaque personnalité. Ruberta possédait un visage plus fin que son homologue, ainsi que des pommettes légèrement plus saillantes. Malgré tout, elle en gardait toujours les caractéristiques du visage masculin d’Atrëburh, ainsi que ses oreilles d’Elfes d’ordinaire camouflées par son imposante perruque rose.

Leur corps balança mollement leur tête vers la droite. Ruberta continua comme si elle regardait Atrëburh dans les yeux.

_Je crois qu’il est temps de se dire au revoir. Tes crimes doivent être punis, tu le sais aussi bien que moi.
Regard à gauche. Atrëburh répondit à son tour une fois le visage de Ruberta évaporé.
_Je suis un héro !
Regard à droite. Ruberta réapparut.
_Tu es un bourreau.
Regard à gauche.
_Le sang des Hauts-Elfes doit rester pur, il en va de notre survie ! Le feu les consumera.
La main gauche de Ruberta souleva avec peine un poignard camouflé jusque là dans sa besace.
_T’en souviens-tu ?
La main droite d’Atrëburh caressa la lame.
_Le poison…
_Nous l’avions égaré en Kaminoi, alors qu’ils manquèrent de surprendre nos ébats amoureux.
Petit gloussement nostalgique.
_Il n’était pas destiné à la Reine, le poison était pour lui. Tout est de sa faute à lui. Je dois protéger la Reine !
_Tu étais si bon, autrefois. Cette obsession… Je pensais pouvoir t’en apaiser, mais elle était la plus forte. Et tu as changé, je ne le supporte plus !
_Il fallait bien les manipuler pour qu’ils comprennent les dangers que représente le mélange des races.
_Le mélange des races ? On appelle cela le métissage.
_Je crache sur le métissage ! Son double et la catin, ils vont leur montrer que les humains collaborent avec les Elfes Noirs. Juste besoin d’un coup de pouce. Pouce pousse le coup de pouce ! Hi hi…
_J’ai tenté de les avertir, tu sais. J’ai vraiment essayée de t’avertir toi aussi, de te mettre en garde ! Mais tu m’en as empêché et nous avons perdu la preuve, le poignard, dans la chambre de la Reine.
_Bien évidement ! Je ne suis pas fou. J’y suis retourné et je l’ai retrouvé, puis caché dans ma besace de druide !
Sourire machiavélique d’Atrëburh soudainement décomposé par la mine abattue de Ruberta.
_Il n’y a rien d’utile pour un druide à l’intérieur de ce sac. J’ai retrouvé le couteau emmêlé dans mon hamac à plumes roses. Tu as manqué de me déformer le bras d’une affreuse cicatrice ! Voici, je te le rends à présent.
Un blanc, puis Ruberta leva les yeux vers le ciel avant de les fermer pour retenir ses dernières larmes.
Au revoir...

La lame du poignard pointé sur sa gorge se tinta d’un léger reflet dans lequel les yeux d’Atrëburh s’agrandirent de surprise. D’un geste vif, Ruberta s’apprêta à enfoncer la lame dans sa chair. Mais comme venu de nulle part, Maitre toki venait de s’emparer de son arme.
La colère déformait les traits de l’illusionniste. Des flammes noires dansaient littéralement dans la prunelle de ses yeux sataniques. La rage, l’envie suffocante de tuer, toutes ses émotions les plus sombres invoquaient ses dons qui matérialisaient l’image de la mort sur son visage.
Trois ans auparavant, ce même phénomène incontrôlé se produisit. L’illusion manqua de tuer son prisonnier lorsque Maitre toki se rendit compte de l’effet qu’il provoquait. Aujourd’hui, l’épisode du mystérieux poignard empoisonnant Gwaedia n’avait jamais quitté sa mémoire. En laissant ses pensées défiler, il comprit les manipulations engendrées par le druide afin d’empêcher la Reine Haute-Elfe de s’unir avec un humain.
On avait retrouvé du combustible Elfique lors de l’incendie au château Kaminoi. Ce jour là, Kyra serait morte si Djïn ne l’avait pas sauvé au péril de sa vie. La seule idée de perdre sa fille ou son amour lui arrachait un cri au cœur. S’il trouvait les coupables, Maitre toki s’était juré de les exterminer jusqu’au dernier.
En cet instant, l’illusionniste savait qu’il tiendrait promesse lorsqu’il giflait le schizophrène. Que Ruberta coexistait avec ce meurtrier était sans importance : il les giflait tous les deux.
Une fois, deux fois, trois fois, le regard d’Atrëburh finit par lui renvoyer sa propre haine. C’est à ce moment là que Maitre toki décida d’enfoncer sa lame dans la gorge du traître.
Trop tard.
Un éclair venait de jaillir à travers l’épaule droite de l’homme : la fléchette de Gwaedia empalait déjà Atrëburh contre le buffet d’Hal Kappon. Mais ce dernier préféra ne rien dire. Un homme intelligent. La Haute-Elfe avança vers son druide d’un pas royal, son regard ne trahissant aucune émotion. Sans prendre la peine de se pencher vers lui, la Reine de Celarawen clama son ordre. « Qu’on me débarrasse de lui. La dnyêdna… » Kalami’tidjèn s’exécuta aussitôt.

_Darlyssa Hel’Agane. Continua la Reine en se tournant vers l’Elfe Noire. Je pense que nous avons des choses à nous dire. Faites éteindre vos torches et venez avec moi, vous êtes mon invitée.



Citation :
Cher journal,

Hi hi ! Je me retrouve dans un petit corps d’enfant. C’est sa mère qui a tenté de me tuer il y a bien longtemps, alors que j’ai toujours été si bon avec elle. Intéressant, n’est-ce pas ? J’ai bien envie de me suicider…

Jour X, Année X, vers l’infini, et au-delà, JE VOOOOLE !


********

Les pourparlers entre les deux Elfes durèrent une éternité. A quoi bon se précipiter lorsque l’on peu vivre des milliers d’années ? Fort heureusement, le débat fut clos avant d’atteindre de telles proportions extravagantes, sans quoi Gwaedia et Darlyssa se seraient déjà entre-tuées. Les soins appliqués envers le druide gravement blessé n’arrangeaient rien à l’affaire.

Du point de vue de la princesse Elfe Noire, s’évertuer à sauver la dnyêdna ; ce traître, équivalait à un acte de guerre.
Du point de vue de la Reine Haute-Elfe, l’assassinat d’un Elfe, aussi dérangé soit-il, était inenvisageable. Mais Ruberta ressemblait plus à une abomination qu’à une Elfe, c’est pourquoi Darlyssa insistait tant auprès de Gwaedia. « Anticipons le réveil d’Atrëburh par le sacrifice du corps de Ruberta ». Toute cette histoire de double personnalité dans un corps métamorphe les rendait folles.
Par miracle, aucune des deux Elfes ne s’était résout d’en arrivé aux mains, même si cela ne les empêchait pas d’insulter vigoureusement leur interlocutrice de tous les noms d’oiseaux qui leur traversaient la tête. Gwaedia et Darlyssa faisaient preuve d’une imagination et d’une verve aussi exotique que diversifiée lorsqu’elles se confiaient à leur tendre sur l’oreiller.

Le jour de l’ultime confrontation, Maitre toki retrouva Sensei encerclé par les Elfes Noirs. Le pensant en danger il s’était rué à son secours, jusqu’à s’apercevoir d’un air hébété qu’il plaisantait avec ses ravisseurs. Ceux-ci retenaient malgré tout Sensei à l’écart, l’empêchant ainsi de participer à la rencontre de Darlyssa et Gwaedia. Cependant, en annonçant l’état critique d’Atrëburh grièvement blessé par Gwaedia, Sensei parvint à s’éclipser auprès de son double.
Durant les jours qui suivirent, les deux hommes échangèrent discrètement le retour de flamme provoqué par des heures de discutions interminables entre Gwaedia et Darlyssa. A force de persévérance, ils parvinrent finalement à convaincre leur compagne d’appliquer un compromis : l’exil.

Ruberta gisait à moitié morte sur un lit de plumes roses. Son visage d’homme maquillé ne démontrait pourtant aucune souffrance. Elle semblait sereine. En apparence : un simple sommeil ponctué de rêves réconfortants. A l’intérieur : un vide effrayant ne demandait qu’à être comblé.
Atrëburh était parti. Personne d’autre ne l’accompagnait plus ; Ruberta était seule. Définitivement et cruellement seule. Dormir et ne plus se réveiller. Dormir et ne penser qu’à lui. Des rêves en demi-teinte. Ruberta gisait à moitié morte.
Un souvenir de trop et elle bondit dans son lit, le cœur affolé. Ruberta inspira à pleins poumons puis cracha l’air d’un cri strident comme si elle respirait pour la toute première fois. Les dernières et terribles pensées d’Atrëburh lui revinrent en mémoire.

Toute sa vie, il n’avait fait que vivre pour Sa Reine. Son dévouement obsessionnel finit par faire hurler son esprit au désespoir quand ses actes de plus en plus radicaux le blessaient de l’intérieur. Pour se défendre, le druide rassembla toute sa douceur et sa bonté à force de méditation. Le chant des flamants roses l’aidait à se concentrer car le son criard de leurs chants surpassait les voix désespérées à l’intérieur de son crâne. Bientôt, Atrëburh éprouva le besoin grandissant de se mélanger à eux plus souvent en multipliant ses venues au marais. La méditation ne suffisant plus ; le druide passa à la confession. Dans sa tête, un flamant rose lui répondait, le pardonnait. Et lorsque les excursions au marais devinrent obsolètes, Atrëburh baptisa la voix par l’anagramme de son nom : Hrubërta… Ruberta.

Un jour, Atrëburh se vengerait de l’infamie de Gwaedia, lui qui fut si dévoué corps et âme ; littéralement. La fuite était son seul espoir. Ainsi, le druide quitta son enveloppe charnelle pour se retrouver chaudement installé dans le ventre de Sa Reine. Atrëburh ne vivrait que pour elle. Puis l’enfant périra, et il prendrait sa place.

Finalement, Ruberta échappa à l’exil grâce aux informations qu’elle communiqua avant même que Gwaedia ne prononce sa sentence. Ruberta fut déclarée innocente pour toutes les charges retenues contre Atrëburh et chaudement remerciée pour être parvenue durant toutes ces années à calmer les folies meurtrières grandissantes du druide.

« Gwaedia enceinte d’Atrëburh… Pour sur, ses visions étaient justes : ma fiancée va me donner un petit garçon. Mais là, j’en suis malade. Devons-nous la faire avorter ? »
Fébrile, Maitre toki ne savait plus où donner de la tête lorsqu’on lui apprit que l’esprit d’Atrëburh s’était logé dans le vendre de Gwaedia. Tout ceci dépassait l’entendement.

_ Hors de question ! S’écria la future maman. Nous trouverons bien un moyen de le chasser à nouveau du corps de notre enfant. Un peu de Faenir, un peu de citron…
_Beaucoup de citron ! Renchéri Maitre toki. Et des bananes.
_Sans oublier l’eau de vie, n’est-ce pas..

Il était étrange de constater la réapparition d’Alaena hors de ses quartiers au moment où l’on prononça le mot Faenir. La rumeur court que la jeune femme s’était éclipsée un temps infini afin de trouver la plus merveilleuse des robes pour le mariage de sa mère. Car la date approchait à grand pas.

Gwaedia serait enceinte de trois mois lorsqu’elle et Maitre toki prononceraient leurs vœux sur le Mont Saint Nikel. Des vieilles pies furent envoyées comme prévu à tous les invités du mariage. Les pauvres bêtes furent spécialement sélectionnées en fin de vie dans un but évident d’une confidentialité optimale. Personne d’autre que les invités ne devaient se présenter sur les terres sacrées du mariage. L’organisation mise en place serait sans précédent.


J-2 avant le mariage : le couple est séparé.

Stress. Cérémonies rituelles. Stress.


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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:32

[quote name='Kyra' date='Saturday 20/11/2010 à 12:30' post='123741']


Citation :
Cher journal,

Je crois… Je crois qu’il y a un monstre dans ma tête. Il me parle d’une petite voix que personne d’autre que moi ne peut entendre. Je suis folle, tu crois ?
Si tu savais les choses qu’il me raconte ! Je ne sais pas du tout comment m’en débarrasser. Tu vois, j’essaye… Il essaye… De me faire du mal. Ce n’était pas assez de contrôler mon pied droit pour blesser un garçon de l’école entre les jambes. Ce n’était pas assez de me faire bondir sur Salie et lui griffer le visage. Ce n’était pas assez de me pousser jusqu’au bord du ravin ; il a fallu que je saute.

Je jure que je n’y suis pour rien ! J’en ai quand même parlé à Navi et elle m’a obligé d’en parler à mes parents. Quand je suis allé voir ma mère et que je lui ai avoué mes envies de refaire le portrait de tous ceux qui m’embêtaient, elle n’a pas bougé. J’ai continué en précisant comment je voulais le faire : en mélangeant des œufs avec de la farine pour les couvrir de honte et de plumes de flamants roses. J’ai cru qu’elle en était morte debout !

Tu sais, quand j’ai sauté de tout là haut, c’était comme si je connaissais déjà cet endroit comme le plus haut que j’aurais jamais pu trouver. Mais moi je n’y suis jamais allée : c’était lui ! C’est lui qui m’a envoyé le souvenir du saut ! Si je suis encore en vie aujourd’hui, c’est uniquement grâce à Navi qui me cherchait partout parce que j’avais disparu depuis longtemps. Alors elle m’a téléportée jusqu’à elle pour me passer l’envie de recommencer, mais vu l’état dans lequel elle m’a retrouvée, elle a bien comprit que quelque chose n’allait pas. La traînée, elle ferait bien mieux de s’occuper de son cul !

JOURNAL !!! C’est pas moi, c’est pas moi ! Je jure que ce n’était pas moi !


Jour X, Année X, batailles intérieures.
Jour X, Année X, victoire au bout d’un fil... de corde.

Le trottinement des sabots, le roulement des chariots sur les pavés, toute une gamme de sonorités familières offrait une musicalité relaxante. La seule approche du cimetière du royaume réchauffait le cœur de Maitre toki plus que de raison. Une sensation certainement discutable pour un étranger, mais les œuvres d’art extraordinaires composant ce lieu en réduisait l’impact morbide de son sentiment. Par sa taille gigantesque, le cimetière prédominait devant la place du château si bien qu’il suffisait que Maitre toki y pose son regard pour enfin se sentir à la maison.
Combien de temps écoulé sans voir sa fille ? Maitre toki fit barrage à la réponse culpabilisante que son mental calculait. Son voyage en Celarawen s’étant quelque peu éternisé, son estomac décida d’accentuer son excitation du retour par la formation d’une petite boule de stress. Quelques personnes reconnurent le convoi Seigneurial et s’en approchèrent pour le saluer. D’autres encore se faisaient tirer de force par leurs enfants, fiers de la nouvelle qu’ils apportaient à leurs parents.

D’ordinaire, Maitre toki ne subissait pas de tels assauts d’affection de la part de son peuple. Le respect qu’il procurait était grand, mais rarement ses longs voyages suscitaient un retour aussi jovial. Ce qui avait changé ? Maitre toki revenait du royaume des Hauts-Elfes en un seul morceau. Ceci laissait présager le bon accueil réservé à cette espèce sophistiquée pour le mariage métis qui se préparait.
Maitre toki déglutit difficilement en repensant à ses péripéties. Son bref retour chez lui avant le mariage lui conférerait un repos bien mérité. Une seule pensée ne le quittait jamais durant le voyage : sa fille qui lui tardait de serrer dans ses bras. Et dormir ! Dormir, dormir…

Une gerbe d’étincelles de diamants explosa en de multiples points d’impact. Dehors, quelques cris de surprise lorsqu’une lumière immaculée scintillait à l’intérieur du convoi.

_Pa’ ! S’exclama l’enfant qui venait d’apparaître sur les genoux de son père en levant les bras vers lui.
_Kyra ?!

Une ultime étincelle pailletée et Navi percuta le siège avant de rebondir en arrière. Sonnée, la petite fée bleue secoua la tête et poussa un juron.

_Navi ? ... Je ne te savais pas connaître les secrets de la téléportation. S’étonna Maitre toki.
_C’était mon deuxième essais ! Révéla la petite fée bleue, non peu fière de son exploit. L’atterrissage reste à revoir, par contre je suis très satisfaite de mon premier essai.
_Quel était-il ?
_Tu l’as sur les genoux.

Maitre toki ouvrit de grands yeux incrédules. Une colère mêlée à une peur inconditionnelle lui montait au visage.

_Tu t’es servi de ma fille comme cobaye ?! (Il explosa : ) Et si Kyra s’était retrouvée encastrée dans la carrosserie !

L’enfant réagit à l’entente de son nom en poussant un gloussement enfantin, tandis que Navi balaya la réplique de cet amateur d’un claquement de langue indigné. La petite fée vola à hauteur du nez de Maitre toki avant de le pointer du doigt.

_ Règle numéro un en magie : toujours s’exercer sur témoin plutôt que soit même pour être à même de réparer les dégâts potentiels. Certains s’exercent en envoyant des singes sur la lune, mais je n’ai pas encore cette ambition. De toute façon on ne peut pas faire fusionner les molécules et la matière de la sorte, c’est grotesque. Ça prouve bien que t’y connais rien. Ce que tu dis est impossible d’arriver !
_Je n’ai pas compris un mot de ce que tu racontes.
_Preuve que je connais mieux mon sujet que toi. Je sais ce que je fais, jamais je ne mettrais la vie de Kyra en danger.

La petite fée se garda bien de préciser que pour cet exercice, la visée restait le plus difficile à maîtriser. On pouvait faire un amalgame avec le tir à l’arc. Plus la cible se trouve éloignée, plus elle semble petite, et plus il est difficile de l’atteindre. La téléportation utilisait le même principe que ce jeu de perspective. Si bien qu’en cas d’erreur, Kyra aurait pu tout aussi bien se retrouver matérialisée dans le vide ou dans le méli-mélo de sabots des chevaux.

_Regarde comme elle est mignonne et en pleine santé ! Poursuivit la petite fée. Même pas un petit bobo malgré toutes ses acrobaties. Et pourtant ce n’est pas le temps de s’essayer à de nouvelles expériences d’escalade qui lui a manqué durant ton absence !

Maitre toki se rembrunit. Il détestait se rappeler d’avoir laissé sa fille si longtemps.

_ Avec les soins magiques que tu prodigues je serais bien étonné de lui trouver la moindre trace de contusion. J’espère seulement que cela n’affectera pas les capacités de son corps à se guérir lui-même.
_Amateur, amateur, amateur ! Tais-toi si t’y connais rien.

Maitre toki laissa un petit rire lui échapper. D’un sourire radieux à l’attention de sa fille – émerveillée devant le visage rayonnant de son père – celui-ci se contenta de remercier Navi pour avoir veillé sur Kyra durant tout ce temps.
Lorsqu’il lui annonça qu’elle pouvait prendre congé, la petite fée ne se fit pas prier. Elle venait déjà de s’évaporer sous la même pluie d’étincelles pétillantes que son arrivée.
Ne le dites à personne, mais il semblerait que la petite fée venait de s'égarer en chemin…

Ce n’est qu’en début de soirée que Maitre toki s’attaqua aux essais de son costume. Techniquement il ne s’était jamais marié, pourtant les souvenirs de son mariage avec Sarie étaient bien réels, tout comme ceux de Kyra qu’elle avait mis au monde. Cette pensée le perturba quelque peu tandis qu’il hésitait entre deux paires de bottes sophistiquées, trop peu confortables pour espérer passer toute une journée avec, et sans développer quelques fâcheuses conséquences plantaires.
Plus tôt dans l’après-midi, le discours touchant qu’il offrit à son peuple fut reçu par de belles acclamations en tout genre. Le mariage aurait lieu dans deux jours et tous semblaient heureux d’accueillir la future épouse de leur Seigneur, aussi Hautement Elfique qu’elle soit.
Mais il fallait faire vite. Maitre toki devait absolument partir dès le lendemain matin s’il voulait arriver à temps. Etre en retard le jour de son mariage n’est jamais une très bonne idée. Qui peut prédire si un concurrent ne prendrait pas plaisir à vous voler la vedette ?
Maitre toki balança les bottes à la figure de son habilleur. S’il ne trouvait pas une solution rapidement, le Seigneur de Kaminoi décida qu’il se rendrait pieds nus à la cérémonie.

Ce n’est que lorsqu’un bruit de fond éclatât en résonnant comme des sonorités festives, que Maitre toki décida de s’arracher à sa séance d’essayage. Son habilleur en était venu à appeler des renforts et celles-ci –des femmes donc- n’avaient visiblement rien de très chaud à se mettre sur le dos ce jour là.
On ne pouvait décidément plus parler de décolleté à ce stade : plutôt d’un éventré. C’est ainsi que Maitre toki qualifiait les deux minuscules rubans rouges qui leur tombaient des épaules, ne cachant que le strict minimum jusqu’à fusionner dans une ceinture tressée en dessous du nombril. Le reste de la robe n’était qu’un long voile de soie fendu très haut sur les deux jambes. Grandes, de splendides et longs cheveux bruns... Des Gwaedia. Elles ressemblaient toutes à des Gwaedia. Misère.

Les demoiselles se voyaient très peu coopératives pour le laisser partir, prétextant la création d’un faux pli en haut de son pantalon. L’une d’elle entreprit même d’esquisser une courbette afin d’y remédier, tout en prenant bien soin d’exposer fièrement la générosité de ses formes. Maitre toki sursauta lorsqu’il senti la faible pression d’une main sur le pli. A supposer que celui-ci existait vraiment. Son teint de peau venait de virer à l’écarlate.

_Non, non, non, non, non ! Répétait t-il d’une voix trop aiguë en se reculant d’un bond. Il n’y a pas de faux pli à cet endroit.
_Mais…
_Sortez d’ici, je vous prie. Vraiment je… (La main d’une seconde femme lui caressa lentement les épaules) Je vais me débrouiller…

Hiii chatouilles ! Venait-il de réagir au souffle parfumé pigmentant la peau de son cou d’un frisson inconvenant. Il tenta de se dégager, mais une autre femme lui maintenait le visage entre ses mains. Elle se tenait si proche qu’une légère bousculade suffirait pour les faire s’embrasser.

_ Il faut que je me déshabille. Balbutia Maitre toki.
_Déshabillez-vous. L’encourageait t-elle.
_Mais non !! ( Maitre toki s’arracha à toutes ces merveilleuses beautés de l’enfer en braquant ses bras devant lui comme pour leur interdire d’avancer plus près.) Il faut que je me sépare de ces vêtements. Par les Déesses je me marie dans deux jours avec ! Je vous en prie laissez-moi me changer.
_Nous ne vous retenons pas. Susurra l’une d’entre elles.
_Ôtez-les.
_Je ne regarderai pas… Gloussa une autre.
_C’est très… délicat de votre part, mais…
_Je mentais !

Toutes les cinq partirent dans une envolée lyric de rires trop intimes pour dépasser les murs d’une chambre à coucher. Maitre toki battit en retraite dans le couloir et leur claquât la porte au nez. Les rires redoublèrent d’intensité tandis qu’adossé contre la porte, il se jura de ne plus jamais entrer dans cette pièce tant que ces prédatrices infernales se trouveraient à l’intérieur. Qu’elles s’amusent avec le dernier homme présent. Lui, peut-être pouvait-il se le permettre.
A cette pensée, un silence étrange étouffa les derniers rires. Il s’imagina un instant à la place de cet homme seul avec ces cinq femmes aguicheuses et divinement belles, puis se ravisa aussitôt.

Un faux pli. Marmonna t-il. Tu parles.

Résigné, Maitre toki n’avait plus d’autre choix que de garder sur lui son costume de marié. Il parcourra le château jusqu’en haut des marches menant à l’entrée, là d’où provenait le vacarme des festivités et la musique. Il descendit l’escalier comme un prince et s’incrusta à la foule.
Au centre de la salle se tenait un buffet copieusement garni. L’envie de s’emparer d’une alléchante cuisse de poulet fit circuler Maitre toki dans une masse de corps qu’il savait ne pas tarder à tourner ivre. L’un d’eux le bouscula et manqua de lui renverser le contenu de son pichet de vin sur son costume.
Blanc. Son costume était blanc. De la tête aux pieds, il respirait la pureté et l’élégance que seul l’or, l’argent et le blanc réunis pouvaient transcender. La moindre tache et toute cette magie imprégnée dans le tissu neuf et délicat disparaîtrait à jamais. La certainement succulente cuisse de poulet valait-elle réellement le risque de détruire son costume de marié ? Maitre toki décida que non.

Un nouvel homme bouscula Maitre toki d’un coup d’épaule. L’infâme ne s’excusa même pas, jusqu’à ce qu’il se rende compte de la personne qu’il venait de violenter malencontreusement.

_Hé,mais c’est le futur marié ! S’exclama t-il d’une voix grasse avant de pousser trois grognements - certainement à traduire comme un rire trop viril. Alors dites-moi, il vous plait cet enterrement ?
_Enterrement ? Répéta Maitre toki comme une question.
_Enterrement ! Enterrement ! Cria l’homme en guise de réponse, et la foule le reprit en chœur :

Enterrement ! Enterrement ! Enterrement !

Les pieds de Maitre toki décolèrent du sol avant même qu’il ne puisse s’en rendre compte. Huit bras musclés le brandissaient dans les airs sous le tonnerre des encouragements de la foule qui répétait toujours en boucle le même mot. Les quatre hommes le transportaient allongé au dessus de leur tête comme un vulgaire sac de plumes – roses les plumes. Car Maitre toki ne se trompait pas lorsqu’il pensait les apercevoir du coin de l’œil. Ruberta n’avait pas menti. Elle qui disait lui réserver une petite surprise même si elle ne pouvait être présente - trop occupée à se préparer au Mont Saint Nickel dans son rôle de prêtresse de mariage.

Les quatre hommes bâtis comme des buffles se déplaçaient avec la grâce d’un chaton sur une corde à linge. Ils n’étaient vêtus que d’une courte jupe de plumes roses ainsi que d’un petit et rond chapeau noir d’où se dressait fièrement une unique plume blanche.
Les Rubert’boys –car c’est ainsi qu’on les nommait- se voyaient spécialement sélectionnés par Ruberta pour l’enterrement de vie de garçon de Maitre toki. Ils le transportaient à l’extérieur du château alors que la foule exultait encore et encore en criant toujours à l’unisson.
« Enterrement ! Enterrement ! »

Ce convoi peu orthodoxe traversa la grande place du château et la foule euphorique le suivrait jusqu’au bout. Quand ils atteignirent l’entrée du cimetière, Maitre toki s’affola.
Soit, il était rentré chez lui avec la grande ambition de se reposer de toutes ses aventures avant le mariage, mais jamais il n'avait commandé le repos éternel.

_Vous ne pouvez pas ! Faites-moi descendre !


Là bas, un nouveau Rubert’boy armé d’une pelle l’attendait de pied ferme derrière un grand trou creusé dans la terre. Maitre toki écarquilla des yeux terrifiés en repensant aux coutumes oubliées de son royaume. Toute cette boue. Toute cette crasse. Toutes ces innombrables tâches indélébiles qu’il se voyait déjà sur le point d’accumuler sur son beau costume immaculé. Maitre toki n’y survivrait pas.

« OMG »

Telles furent les dernière pensées de Maitre toki avant que les Rubert’boys ne le jette dans les abîmes. Non, il ne rêvait pas. Il venait bien d’entendre le déchirement d’un tissu lorsqu’il se réceptionna douloureusement dans sa tombe.
Un peu sonné, la vision trouble du futur marié lui apprit que le dernier Rubert’boy se penchait au bord du trou avant d’utiliser une pelle pour lui refermer le cercueil au visage. Les ténèbres l’engloutirent soudainement, et déjà un bruit sourd sous son nez informa Maitre toki que la terre recouvrait son cercueil.

En Kaminoi : « enterrement de vie de garçon » prenait réellement tout son sens.


Fin.

Ce ne pouvait être que la fin.


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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:34

[quote name='Kyra' date='Wednesday 15/12/2010 à 18:40' post='123828']

Citation :

***CONFIDENTIEL***
***CONFIDENTIEL*** ***CONFIDENTIEL***


Chère vieille pie,

Tu as traversé les continents et bravé les tempêtes pour venir t’écraser morte de fatigue dans les mains d’un inconnu. Le moment venu, puissiez-vous enterrer dignement cet oiseau agonisant avec tous les honneurs qu’il mérite.


Chère V.I.P (Vraiment Incroyable Personne)

Vous avez donc découvert -certainement abasourdi- ce parchemin solidement harnaché à ce piètre cadavre ailé. N’ayez crainte si l’idée d’un mauvais présage venait à vous effleurer l’esprit. Contrairement à l’oiseau de malheur qu’est le corbeau, soyez rassuré d’apprendre que les pies portent avec elles le symbole de la joie.
Oui, la pie est annonciatrice de bonheur conjugal. Quelle merveilleuse messagère pour la nouvelle qui vous attend :

Gwaedia Erahéniel ; fille de Vaelys La Vaillante et Rolàan Le Sage ; Reine des Hauts Elfes du sud de Celarawen

Ainsi que

Maitre toki ; fils de Taki l’intrépide et Maître Toki ; dirigeant des terres humaines de Kaminoi

Vous invitent à célébrer l’union de leur amour et de leur sang devant les Dieux, les Déesses et leurs proches les plus dévoués.

La cérémonie du mariage sera menée par la prêtresse emplumée Ruberta. Elle se déroulera lors de l’alignement parfait des astres divins de la force, l’amour et la fécondité, au sommet du Mont Saint Nikel.
Le lieu sacré fut choisi pour son égale distance entre les royaumes des futurs mariés qui souhaitent de tout cœur vous compter présent lors de ce grand événement.

D’accord, cette pie ne tardera certainement pas à vous claquer entre les doigts, ce qui est pour le moins peu ragoûtant et nous en sommes les premiers attristés. Utilisez le temps qu’il lui reste à vivre comme le décompte avant le début de la cérémonie, car aucun retard ne sera toléré. On est toujours plus attentif au sablier du temps qui s’écoule lorsque des vies sont en jeu.

Les futurs mariés ne désirent en aucune façon partager leur bonheur avec les pique assiettes, les journalistes de Papa Rassis où autres invités d’infortune. Soyez donc assuré que la sécurité mise en place pour l’événement vous garantira confort et sérénité pour jouir au mieux des festivités.


Jour X, Année X, le spectacle commence.


***CONFIDENTIEL***
***CONFIDENTIEL*** ***CONFIDENTIEL***


Le rêve ne paraissait pas si réel que cela. Il n’y avait absolument rien de réaliste dans ces lignes de couleurs phosphorescente se courbant au grès d’un vent insoupçonnable. La trajectoire imprévisible rendait le phénomène encore plus beau, comme si un arc en ciel d’ordinaire statique décida que lui aussi méritait de se mouver à la manière des ondes fluides causées par le courant passionné d’un ruisseau.
Maitre toki ne savait donner aucun mot sur ce qu’il contemplait. Il lui sembla pouvoir bouger, mais une pression qu’il n’avait pas ressenti jusqu’alors écrasa tout son corps comme épris par le poing d’un géant. Les courbes multicolores prirent la forme d’une sorte de tissu soyeux dont les fils balayaient le ciel. La chevelure de la divinité dansa autour du visage qui venait de lui apparaître.

_Par les Déesses… Aucun son ne sortait de la bouche de Maitre toki, et pourtant les Déesses lui répondirent en un écho irréel.
_Oui, nous le sommes.
_Le manque d’air est vraiment un puissant narcotique.
_ Nous attendions une femme depuis si longtemps. La fille du fils de la fille, peut-être. Nous ne pensions jamais qu’un homme puisse communier avec nous, tout comme la notre en son temps.
_Il faut vraiment que je me réveille. Vous n’êtes pas les Déesses. Vous n’êtes qu’un rêve.
_Nous le sommes.
_Quoi, le rêve ou les Déesses ?
_ Ton peuple a choisi de te rendre à la terre comme tout homme sur le point de le devenir, dans l’espoir de cette communion.
_Vous parlez de cette vieille tradition d’enterrement de vie de garçon.
Devina mentalement Maitre toki. Simple superstition.
_ Nous t’avons donné une fille. Tu lui donneras une mère.
_Bien que j’aime Gwaedia, Sarie était la mère de Kyra ; la remplaçante n’existe pas.
Protesta silencieusement Maitre toki, mais un son vivace lui fouetta les tympans pour le faire taire.
_La Haute-Efle féconde fera une mère adéquate. Nous donnons notre bénédiction à l’union qui –avec l’alliance de Valar- donnera naissance à la seconde.
_Une seconde union ?
Ne put-il s’empêcher d’interroger sans mot dire, tout en sachant qu’il ne recevrait certainement pas de réponse directe. Insinueriez-vous que ce mariage est voué à l’échec ? Non… la seconde…
_La première, la voyageuse, sera complétée par la clandestine en qui nous donnons le pouvoir de création. La Gardienne de Kaminoi se dressera une nouvelle fois et périra contre L’écroué. Jamais Il ne doit se soulever. A la terre Il retourna. A la terre Il restera.


Un chemin de poussières illustra les dernières paroles des Déesses dont le visage encadré par des lianes de couleurs chatoyantes s’émoussa à travers les méandres d’un voile opaque. Ce voile s’étendait comme un drap que l’on déplie de tout son long, formant de paresseuses vagues glissant faiblement sur le tissu. Lorsque les couleurs furent entièrement remplacées par des ténèbres familières, Maitre toki comprenait qu’il regardait le plafond de son cercueil.

Ce ne pouvait pas être la fin.

Son cœur affolé bondissait frénétiquement contre les parois de sa prison de chair, et Maitre toki l’imitait contre sa prison de bois et de terre. Il ne trouvait plus l’air nécessaire pour respirer, si bien qu’il en arriva à se demander comment il parvint à tenir jusque là. Quelque chose avait brûlé tout l’air supposé lui rester et cela le fit paniquer d’avantage.
Terre et poussières s’écrasaient sur son visage et son corps lorsqu’il comprit qu’on ouvrait sa boite des miles tourments. Un rayon de lumière acerbe et insupportable se découpant dans l’interstice lui dévora les yeux qu’il couvrit spontanément des deux mains. Qu’il puisse enfin bouger si facilement le libérait tout de même d’une charge trop lourde à porter, comme si d’un seul coup il venait de perdre le triple de son propre poids. Maitre toki n’aurait pas été surpris si jamais il s’élèverait dans les airs, bien qu’il savait pertinemment que cette sensation n’existait qu’à l’intérieur de son subconscient.

Parvenant à se lever avec difficulté, Maitre toki venait de lancer ses bras à l’extérieur de son trou en espérant trouver un appui suffisant et parvenir à s’extirper de cet enfer. Ses yeux refusaient de lui dévoiler plus qu’une bouillie de formes incertaines, mais il reconnaissait les silhouettes qui l’entouraient comme les êtres humains qu’ils étaient. L’air emplissait de nouveau ses poumons, mais il leur fallu encore plusieurs rodages pour bien vouloir lui permettre d’extirper un cri abominable hors de sa gorge. Cet hurlement lui fit le plus grand bien, et c’est à ce moment précis que ses yeux lui accordèrent de nouveau l’usage complet de sa vue. Maitre toki s’extirpa hors de sa tombe comme une renaissance, laissant sa défunte vie de garçon derrière lui.

Il régnait un silence de mort dans le cimetière. Un silence de circonstance pour la plupart d’entre eux, mais certainement pas pour celui de Kaminoi. Maitre toki voulu s’écrier de rage qu’il tuerait quelqu’un pour cette torture, mais pourtant il n’en fit rien. Lui-même avait déjà assisté à plusieurs enterrements de vie garçon, et jamais personne avant lui n’avait autant souffert de passer une nuit dans un cercueil consacré à cet effet.
Cette fois pourtant, quelque chose avait contrecarré la magie mise en place. Quelque chose de sombre, de froid et de démoniaque. Quelque chose qui riait comme le grondement d’un tremblement de terre dans les tripes de laquelle on L’avait enfermé et oublié –croyait-on à jamais.
A partir de cet instant, Maitre toki comprit combien il lui fallait préserver sa fille des prédictions qu’il venait de recevoir dans ses rêves. Si bien sur il s’agissait réellement de rêves. Kyra était encline à suivre le destin de sa grand-mère pour devenir la prochaine Gardienne de prison. Une prison appelée Kaminoi. Le jour venu, il savait que sa fille devrait faire face au cauchemar de ses souvenirs d’enfance. Maitre toki allait élever Kyra comme la combattante farouche qu’il lui faudrait devenir pour survire.

De la crasse avait pénétré le tissu hors de prix jusqu’à s’imprégner totalement de celui-ci. Le futur époux était simplement méconnaissable dans ses vêtements poisseux et déchirés.
Plus rien n’avait d’importance pour lui. Grimper en voiture et se rendre le plus vite possible sur les lieux du mariage demeurait sa priorité numéro un. Tant pis pour les dommages collatéraux. Il trouverait bien une solution en chemin. D’ailleurs une fois sur place, quelqu’un lui trouverait peut-être une alternative vestimentaire. Oui, Maitre toki récita mentalement la liste des invités jusqu’à retenir deux où trois noms d’hommes aux mensurations similaires. D’une manière où d’une autre, quelqu’un devrait lui céder ses vêtements. A cette pensée, une infime pointe de sadisme effleura ses lèvres d’un faible sourire. Qui serait l’heureux élu ?

Le Mont Saint Nickel ressemblait plus où moins à n’importe quel pic rocheux. A ceci près que dans cette immense plaine vallonnée se trouvait cette gigantesque tour naturelle qui disparaissait derrière les tous premiers nuages accessibles.
Ce dernier mot n’était pas utilisé par hasard lorsque l’on décrivait le lieu de la cérémonie. Tout un système d’accessibilité fut spécialement aménagé pour l’occasion afin de permettre aux invités Vieilles-Pies d'en atteindre le sommet. Comme s’ils suivaient la piste d’un escalier en colimaçon invisible, les deux chaînes de dragons tournoyaient dans le ciel autour de la montagne. L’une grimpait tandis que l’autre descendait comme un système de dragon élévateur.
Aux pieds du rock, les invités présentaient leur Vieille-Pie aux passeurs Haut-Elfes afin de pouvoir jouir des Dragueurs qui les élevaient jusqu’au septième ciel. Pour chaque Dragueur, un barde humain où Elfique accompagnait les invités en leur offrant quelques petites minutes de détentes pour les faire patienter durant le trajet.

_Ta-ta-la-la, ta-ta-la-la !
Chantonnait le barde Elfique au grand désespoir de Recto. Ta-ta-la-la, ta-ta-la-la !
_Si il se la ferme pas bientôt je lui bouffe les globes oculaires avec la pointe de ses oreilles comme un cure-dent piquant des olives. Vociféra tout bas la gobeline à sa frangine.
_T’auras pas le temps. Contredisait Verso du même regard exacerbé que sa jumelle. J’lui aurais déjà pété la mâchoire avant de le faire cuir par le dragon comme une brochette surprise.
_Tu veux dire comme ces brochettes où ‘faut deviner c’est quoi le morceau de viande qu’on bouffe ?
_Ouaiiis !

Par une suite d’événements malencontreusement cocasses, les femmes de Pile et Face s’étaient retrouvées coincées dans un convois elfique pour monter au sommet du Mont Saint Nickel. Il se trouve que par la force de leurs vieux réflexes, les jumelles avaient tenté la fraude afin d’échapper aux sévères contrôles exercés par la sécurité. Quand la fraude s’avéra infructueuse, les gobelines contre-attaquèrent par une tentative de corruption. Mais lorsque la proposition d’un numéro lesbien effleura leurs lèvres gonflées de champignons, les gardes Elfiques furent si dégoûtés qu’ils manquèrent de les exécuter sur place. Par chance, Reco et Verso se souvinrent de justesse que les Vieilles-Pies accrochées à leur ceinture trouvaient une autre raison d’être qu’un simple encas pour les petites faims. La sécurité n’avait eu d’autre choix que de balancer les fausses fraudeuses dans le premier Dragueur venu pour s’en débarrasser au plus vite. Un dragueur puant atrocement le luxe, la beauté et la distinction. Le Haut-Elfe, par tous les porcs !

_Dis ? Interrogea soudainement Recto. Elles nous servent plus à rien les Vieilles-Pies maintenant.
_T’as raison. Avec ces histoires de brochettes surprises j’ai grave la dalle…

Cet exemple illustrait parfaitement les raisons pour lesquelles on ne trouvait que des Hauts-Elfes aux pieds du Mont Saint Nickel. Un : il n’existe aucun pareil en terme de classe et de prestige que celles d’un Elfe en guise de présentation. Deux : l’efficacité redoutable de leur vue était largement mise à contribution pour débusquer les intrus armés de leur contrefaçon d’invitation.
Aussi bien sur terre que dans les airs, personne ne pouvait espérer atteindre le sommet sans en subir les conséquences. Les équipes terriennes et aériennes, humaines et Haute-Efles, s’étaient déployées afin de couvrir un maximum de terrain pour traquer les « troubles fêtes ». L’empereur lui-même - qui ne pouvait se lire parmi la liste des invités - trouverait bien grand malheur s’il tentait la moindre intrusion.

Les Vielles-Pies mirent un certain temps avant de toutes arriver au sommet, ce qui permettait aux animateurs en tous genres de finaliser correctement leurs prestations. C’était d’ailleurs pour cette raison que Recto et Verso ne venaient pas accompagnées de leurs époux Pile et Face – au grand soulagement de ces derniers. En réalité, les jumeaux gobelins préparaient les derniers détails de leur numéro.
Une scène centrale fût érigée au centre du plateau sur lequel se déroulerait la cérémonie. Les invités se déployaient en cercle autour d’elle jusqu’au bord délimité par les nombreuses tables du buffet puis la sécurité elle-même. Il faut dire que le pic du Mont Saint Nickel se trouvait suffisamment large pour accueillir énormément de monde. Il n’y avait que peu de chance de se retrouver prêt du bord malgré la foule, mais par prudence, mieux valait en éloigner les enfants, les ivrognes ainsi que les personnes âgées par des mesures draconiennes.

On avait monté deux grandes tentes en tissu raffiné dont un tapis de plumes blanches coulait jusqu’à se déverser sur la scène centrale surélevée de trois marches. Un voile opaque rose, bleu et or suspendu comme par magie encerclait toujours cette estrade afin d’empêcher les curieux de jeter un œil sur les surprises qu’on leur réservait.
A l’origine, Gwaedia avait invoqué le droit de veto de la mariée pour une décoration monochrome. Pour le fils qu’elle savait mettre au monde dans les six prochains mois, la Reine de Celarawen voulait reproduire l’univers bleu de ses prémonitions le concernant. Du service de table en passant par la nourriture et les invités : tout, absolument tout serait peint en bleu.

« Aaa- schtroumpf ! » Avait éternuée Ruberta pour ne pas entendre les ordres de la Reine. Après tout, la future mariée n’en était pas à son premier coup d’essai. Certes, la Reine était veuve. Rien ne prouvait pour autant à Ruberta que Gwaedia n’était pas une veuve délibérée…
Heureuse de cette trouvaille philosophique permettant de justifier son entêtement hors du commun, Ruberta avait dressé une patte solennelle en décidant que le droit de veto de la Reine avait expiré lors de son premier mariage. Un droit quelle pensait déjà avoir usé et abusé comme toute femme qui se respecte. Ruberta ne pouvait en être que certaine : elle aurait agit exactement de la même façon.
Dès lors, une bataille fut engagée entre l’organisatrice et la future épouse, créant ainsi une décoration artistiquement dépareillée unique en son genre. Bizarrement, l’alliance du rose et du bleu par les ajouts stratégiques et discrets d’or et d’argent de Maitre toki, créait une union visuelle unique à couper le souffle. Deux mondes unis contre toute vraisemblance pour un mariage métis des plus féerique.

_Ça y est on est prêts ! Soufflèrent en chœur Pile et Face… Ou plutôt Rose et Bleu ?

Levé de rideau.

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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:35

[quote name='Kyra' date='Friday 11/02/2011 à 16:52' post='124127']

Citation :

Cher journal,

Je profite d'un instant de répit pour mettre les choses au clair : j'en ai par dessus la tête de ces potions infâmes à base de jus de crevette !! Je lutte très fort pour garder le contrôle mais je sens bien qu'il gagne du terrain. Il paraît que mes parents savaient que ce jour arriverait. Ce jour où un espèce d'énergumène dégénéré viendrait me prendre la tête. Littéralement je veux dire. Il partirait avec sous le bras et s'en irait jouer au lancé de boulet jusqu'à ce qu'elle éclate en deux comme une pastèque !

L'histoire est assez compliquée, et je dois dire que j'y comprends pas grand chose. Moi je suis trop occupée à vomir plusieurs fois par jour les mixtures d'exo... d'exotruc, d'exorsismique. Pas tout suivi. On m'a dit qu'à chaque vomissement c'est un peu de lui que je renvoi. Et bien il doit être énorme, vu tout ce que j'arrive à... BURP...

Je re...


Jour X, Année X, ta mère suce des mites en enfer !

Les murmures de la foule imitaient le remous de l'eau sur le sable lorsqu'un courant d'air chaud s'empara du rideau comme d'un papier froissé. Celui-ci virevoltait de ses combinaisons de bleu et de rose pour disparaître en une brume étincelantes. Les perles d'or et d'argent brillaient de milles feus doux, s'évaporant vers les cieux tels des flocons de lumière rayonnante.
Derrière ce voile de lucioles, apparut l'esquisse théâtrale de la Diva telle une apparition magique. Elle poussa une note parfaitement maîtrisée, invoquant un chant onirique qui percutait le vide des cieux en échos paresseux. Autour de la scène, les musiciens invoquèrent à leur tour la première série de notes enivrantes de leurs instruments à vent et à corde. Beaucoup de personnes n'y prêtèrent attention qu'à partir du moment où leur musique accompagnait le chant de la Diva, comme elle seule trônait sur l'estrade centrale.
« l dolce suono mi colpi di sua voce! »

Sa longue robe bleue-océan contournait la moindre de ses formes, si proche de la véritable couleur de sa peau que l'une et l'autre se confondaient de manière très harmonieuse. Les gestes doux, presque liquide de ses mains, balayaient au rythme de son chant six longues tresses bleues lui pleuvant jusqu'aux genoux. Elles prenaient naissance de chaque coté de son crâne recourbé comme une épaisse queue de cheval, alors que d'autres trainaient dans son dos jusqu'à ses pieds.
« Ah, quella voce
M'e qui nel cor discesa! »


Les dernières notes haut-perchées semblaient mettre une éternité avant de mourir aux oreilles des spectateurs, si transcendés par le chant que la plupart n'avaient toujours pas remarqué les deux gobelins se chamaillant peu discrètement derrière elle.
Pile et Face - alias Rose et Bleu de leur nom de scène - venaient simplement de décider que l'un d'eux volerait la vedette de l'autre. Aussi, les jumeaux n'en pouvaient plus d'attendre pour exécuter leur tour de magie et bondirent comme un seul gobelin aux pieds de la Diva.

« Edgardo! » Trembla subtilement son chant comme une alerte. « Lo ti son resa, »

En professionnelle, elle parvenait encore à contenir en son fort intérieur l'éclosion d'une colère bien réelle, feintant un jeu d'acteur avec les jumeaux gobelins. Pourtant, Rose et Bleu ne se privaient pas pour prendre la parole et saluer les invités. Le chant de la Diva n'était plus, pour l'instant, que l'agréable fond sonore de leur numéro.

_Cette culotte ne vous appartient pas ! Fût pointé quelqu'un du doigt par Bleu.
« Edgardo! »
_Ça je ne crois pas... Renchérit Rose. C'est celle du maître !
« Aaaaah ! »
_Voleur ! La culotte du marié !
« Edgardo mio... »

Les gobelins s'esclaffèrent d'un rire à gorge déployée. Profitant de l'ouverture généreusement offerte, l'un deux y enfonça sans ménagement son bras droit jusqu'au coude.
« Si, ti son resa fugiti io son da' tuoi nemici »

Tout le monde connait le fameux tour du lapin apparaissant dans le chapeau du magicien. Ici, les gobelins en expérimentaient l'un de ses dérivés... les plus insolites. Bleu s'acharnait à fouiller l'intérieur de la gorge de Rose. Avec les grands yeux gourmands d'un enfant le jour de son anniversaire, le gobelin provoquait d'affreuses déglutitions étouffées dans la gorge de son frère et n'en trouvait ses réactions que plus drôles encore. Quand Rose finit par ne plus en pouvoir, une bile remontant du plus profond de ses entrailles dégoulina de sa bouche asséchée.

« Baaaaah ah ah aaah nemici! » Chantait la Diva avec une once de dégout dans la voix.

D'un geste victorieux, Bleu extirpa son bras enfouit dans le tube digestif de Rose, juste avant que celui-ci ne vomisse le contenu de son estomac aux pieds de la cantatrice. Alors, le gobelin maquillé de rose jouissait de son trophée porté à bout de bras à la vue de tous.
Non pas un lapin, mais une culotte bourgeoise qui devait certainement se trouver magnifique si elle n'aurait pas formé ce paquet de tissu imbibé de vomi et autres fluides douteux. Les yeux de la Diva fixaient les restes d'une purée organique éparpillée sur le sol de son espace vital avec une expression... meurtrière.
« Un gelo mi serpeggia nel sen! »

Dans l'assistance, quelqu'un venait de perdre son sous-vêtement à présent prisonnier des petites mains sales et grassouillettes du gobelin magicien.
« Trema ogni fibra. »

Bleu étudiait avec un grand intérêt la tenue de chaque invité que ses yeux rencontraient autour de lui. Le sadisme exprimé sur son visage grandissait à mesure où son regard s'approchait de nouveau vers le propriétaire de la culotte dérobée. Quelqu'un allait finir les fesses à l'air...

« Vacilla it pie! » Semblait mettre en garde la Diva d'une voix brusquement alarmée.

Prit de court dans ses propres jubilations, Bleu ne remarqua que trop tard la vengeance de son frère se manifester par un violent placage au sol. D'un coup sec, Rose enfonçait son poing droit à l'intérieur du gobelin pour lui soutirer quelque chose par un tout autre orifice.
Les voix de la magie sont impénétrables... Du moins la plupart du temps.
« Presso la fonte! »

Outrée, la Diva décida qu'il lui fallait passer à l'action et interrompre une bonne fois pour toute le numéro obscène de ces énergumènes irresponsables.
« Meco t'assidi alquanto »

Comme s'ils pouvaient ressentir toutes les tentions électrique de la scène, les musiciens baissaient graduellement la puissance de leur musique jusqu'à ce que seule la voix de la Diva emplisse les montagnes de toute sa détresse. Rose continuait de lutter, tirant de toute ses forces à travers le conduit anal de son frère misérablement exposé.
« Si, presso la fonte meco... »

L'invité refusait obstinément de se laisser ridiculiser une seconde fois et s'accrochait désespérément à son pantalon.

« T'assiiiiiidiiii... ... ... » Bouillonnait intérieurement la Diva.

Et l'invité perdit la bataille.

Le silence dévora le chant de la Diva qui semblait inspirer une dernière et gigantesque bouffée d'air avant de déclencher sa tornade dévastatrice. En improvisation totale, les musiciens s'offraient le plaisir d'une musique violente et saccadées comme venue d'un autre temps.
« Ah, aah aaaah ! »

La Diva venait de bondir vers Rose pour le malmener tandis que ses mains finirent par se retrouver serrées autour de son petit cou pris au piège. Un long cri à vous déchirer les tympans retentit des cordes vocales de la Diva en plein combat.
Mais de quelle droit osait-elle interférer dans le spectacle des gobelins avec autant de sarcasme dans les pulsions de ce rire de cantatrice ! Bleu, libéré du bras pénétrant de son frère, s'agrippa vénalement à la robe de la Diva en cherchant à la liquéfier sous la frénésie de ses griffes.
« Oh aie aie aie aie ooooh ! »

La Diva entra dans une danse désespérée dans laquelle elle cherchait à se débarrasser des gobelins. Elle balançait ses bras de bas en haut comme un cactus pampa chassant les moustiques.
Rose lui agrippa un biceps en y plongeant ses crocs et la Diva redoubla d'inventivité vocale sous l'effet de la douleur. Sa voix déraillait dans des aiguës inimaginables qu'elle-même ne pensait jamais pouvoir atteindre.
Pas le temps de se féliciter pour cette performance inattendue. De son autre main, elle s'empara de Rose qui trouva la douce satisfaction de lui arracher un tendre morceau de chair bleue. Toujours dans le même mouvement, la Diva se plia en deux pour balayer le deuxième parasite agrippé au tissu de sa robe.
Un, deux, trois : Les gobelins s'écrasèrent au sol et la Diva saluait son publique.

Nouveau silence.
Tétanisé dans un premier temps par un mélange de sentiments contradictoires, l'auditoire décida crescendo d'accorder une acclamation triomphale pour le spectacle improbable auquel il venait d'assister. Tous, sauf éventuellement la pauvre victime du tour de magie des gobelins, à demi-nue, et pas forcément de la meilleure moitié.

Quelques sbires connus pour former les Rubert'boys venaient de se creuser un passage dans la foule sans faire preuve d'aucun ménagement. Pour la sécurité de tous - et si l'assistance souhait sortir indemne de ce mariage - mieux valait intervenir et écourter le numéro des gobelins. Quand à la Diva, on la conduisit tant bien que mal en coulisses avant de la déposer sur une civière. Trop d'agitations épileptique pour ses pauvres vertèbres. Un médecin lui diagnostiquerait certainement un bon lumbago.

Les gobelins avaient entendu Maitre toki se plaindre de son costume de mariage irrécupérable. Dans l'espoir d'une récompense des plus généreuses, ils s'étaient alors mis en quête d'en soutirer d'autres afin de lui épargner un tel embarra le jour de son mariage.
Plus tard, une étrange rumeur allait courir. Maitre toki aurait lui-même été à l'origine de toute cette manigance... Encore une bonne raison pour faire parler de lui, diront les mauvaises langues ! Auraient-elles forcément tord pour autant?

Mais alors qu'on pensait le spectacle terminé, un nouveau personnage haut en couleurs fit son entrée sur la scène centrale. A la première marche, on apercevait l'ombre touffue d'une longue plume se pliant sous une faible brise. Le soleil se perdait au loin derrière les nuages dorés par l'arrivé imminente de la nuit, si bien qu'à la seconde marche, la plume paraissait s'embraser de milles feux.
La silhouette s'élevait à mesure où elle avançait lentement sur l'estrade, jusqu'à l'apparition des deux compagnons qu'elle tenait souplement en laisse dans chaque main. La prêtresse Ruberta prenait place au centre de la scène accompagnée de deux majestueux flamants roses. Sous l'effet de la lumière couchante, leur pelage s'embellissait d'un rose si chaud qu'il en devenait presque rouge. La longue robe de Ruberta en imitait les reflets : un mélange sophistiqué de plumes et de dentelles agrémentées d'un soupçon de provocation par une fente à mi-cuisse, découpant une longue jambe nue montée sur une botte de cuir au talon vertigineux.
Avec de telles chaussures, Ruberta était contrainte de tellement cambrer les reins que cela en paraissait douloureux. Pourtant la prêtresse ne laissa rien paraitre derrière le sourire d'une femme convaincue de toute la grandeur de sa beauté et de son élégance. Elle inclina légèrement la tête, faisant tinter discrètement ses boucles d'oreilles de phénicoptères et balancer la plume de son serre-tête par dessus une perruque rose parfaitement coiffée.

_Tadam', Ta-Dame... ! Présentait-elle ses familiers.

Les deux flamants roses se dressèrent sur une patte de toute leur majesté. Le ventre bombé, la tête haute, les plumes lisses, le regard hautain : tout en eux transpirait l'assurance et la vantardise. Ruberta les imitait à la perfection, à tel point qu'on l'aurait cru unijambiste. Son sens de l'équilibre dépassait de loin les lois traditionnelles de la gravité.

_Ne sont-ils pas magnifiques mes deux jolis compagnons? Ne sont-ils pas merveilleusement beaux et gracieux? Alors, par les pouvoirs qui me sont conférés en ce jour si particulier, je vous déclare, Tadam' Ta-Dame : mari et femme !

Des cris aigus et grinçants s' élevèrent des phénicoptères. Alors, Ruberta les récompensa par une offrande suspendue à ses poignets comme un bracelet. Une crevette chacun !

_Je m'étais jurée de ne pas pleurer. Renifla discrètement la prêtresse en détachant ses flamants roses. Partez à présent. (Sa voix n'était plus qu'un murmure.) Une vie fabuleuse vous attends derrière ces nuages. J'aimerai tant pouvoir vous rejoindre un jour. Volez !

Guidés par la lumière chaude du soleil, les flamants roses s'envolèrent au dessus de l'assistance sous les battements sourds de leurs ailes déployées. Ruberta leva de grands yeux attendris pour contempler leur premier vol conjugal, tandis que Gwaedia et Maitre toki sortaient de leur tente individuelle au même instant.
Comme pour venir les chercher, les flamants roses se séparèrent un instant en exécutant un grand arc de cercle dans le ciel, rebroussant chemin pour mieux se retrouver aux cotés des futurs mariés sur le chemin de l'autel. Marchant sur leur tapis de plumes blanches, ils échangèrent l'un et l'autre un long regard d'amour et de connivence à travers les invités qui les séparaient.
Les mêmes souvenirs se bousculaient dans leur tête. Si proches et si loin à la fois, telle la torture familière de leurs jeux amoureux en forêt. Une rivière, un hamac, des plumes et des pommes. La tentation à l'épreuve des nerfs. Deux corps nus et parfaits attirés l'un à l'autre. Se retrouver à toux prix, juste pour le plaisir de s'aimer.

Aux yeux du monde, Gwaedia resplendissait dans une robe haute couture Elfique. Le satin blanc épousait la lumière du soleil couchant en de multiples reflets cuivrés. Les longues manches de la robe se découpaient autour des coudes en une fente laissant deviner la douceur de sa peau. Une ceinture de fils d'argent entremêlés épousait la forme de sa taille comme pour célébrer les 3 mois de vie qu'elle protégeait sous la chaleur de son ventre. En remontant jusqu'à ses longs cheveux noirs coiffés d'une couronnes ailée en mithril, on pouvait suivre le chemin d'une cape blanche terminée en traine. Cette natte décorée de fils d’argent dégringolait jusqu’à mi-cuisse. A mi-cuisse...
Maitre toki secoua la tête et jugea la distance qui le séparait d'elle jusqu'à l'autel. Plus que quelques pas. Leur chemin ne convergeait qu'une fois sur scène, et cette fois ce serait pour toujours.

Regarder le soleil en face n'est jamais chose aisée. C'est pourtant cette sensation que l'on ressentait en regardant le marié qui flamboyait d'or et d'argent. Le bandeau en soie blanche incrustée de minuscules pierres argentées qui ceinturant son front s'éparpillait en quatre rubans de tissu fin. Deux lui descendaient jusqu'à la taille devant la poitrine, et deux autres derrière son dos. Sur sa cape en cuir de Dragon d'or, relevée en un large col pour lui dégager le cou, fut broché une multitude de chaînettes en argent. Elles brillaient comme autant de feux follets en train d'imploser. Cette cape se refermait devant lui, dissimulant en partie la chemise blanche cousue de fils d'or et d'argent glissée dans un pantalon de cette même mantière scintillante. On pensait même pouvoir distinguer une dague décorative incrustée de diamants accrochée à la ceinture. Mais ce genre de détails divergeait selon le souvenir des personnes présentes, comme si personne n'avait vu la même chose ou assisté au même mariage.
En revanche, les bottes qu'il portait firent l'unanimité en terme de trésor d'ingéniosité. Elles paraissaient autant élégantes que peu confortables, et pourtant elles lui permettaient de se mouvoir avec autant d'aisance que si il était pied nus.

Soudain, la marche de l'illusionniste s'affola et il se mit à courir. Un tel exploit relevait du miracle lorsqu'on chaussait du mithril. A son tour, Gwaedia accéléra comme pour prendre ses jambes à son cou sans jamais s'inquiéter de l'encombrement de sa robe.
L'attente était trop longue et les deux époux se ruaient vers l'autel. Et si les mariés se précipitaient avec autant d'aisance que si ils étaient nus : c'est justement parce qu'ils l'étaient !

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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:36

[quote name='Kyra' date='Saturday 05/03/2011 à 17' post='124189']


Citation :
Cher journal,

Courage, courage, courage. Cette fois j'ai bien cru que c'était la fin. 'Faut arrêter les bêtises maintenant...

Mais tu sais, j'avais tellement mal après avoir bu ce truc qu'en fermant les yeux de douleur, je me voyait dans une sorte de cocon blanc comme les nuages avant de trouver le sol qui me rattrapait à vitesse folle. Et au moment où je pensais m'écraser : BAM ! Plus de vertiges. A m'en péter le genou par terre...
J invente rien ! Aussi vrai que j'écris ces lignes, j'ai vu une pluie de plumes s'envoler et me porter vers le ciel. Je me suis sentie voler. J'ai déployé mes ailes et je me suis enfuie. Loin, très loin, là où personne ne pourrait jamais me retrouver, là où personne ne pourrait jamais me torturer. Je dérivais pour toujours à travers les marécages de mes tourments effacés pour de bon. Libre. Oui, j'étais libre.

Trop bizarre le jus de crevette à la banane. J'ai même pas l'impression que toutes ces phrases venaient de moi. Mais bon, de qui d'autre ? Parce que cette fois je crois bien que ça y est : je me sens enfin seule avec moi-même ! Comme un poisson dans l'eau, ou peut-être un oiseau dans le ciel ?

Jour X, Année X, carrément féérique !


On dit que pour survivre face à une assistance alors qu'on s'apprête à prendre la parole devant elle, il faut l'imaginer en sous-vêtements. Ce n'était pas assez.
Ne pas se tromper dans le texte, ne pas se tromper dans le texte... Maitre toki se répétait continuellement cette phrase pour s'encourager à ne pas oublier le mot le plus important de toute sa vie. Car on n'arrive pas le jour de son mariage sans connaître parfaitement les mots à prononcer. Cela ne se fait pas.
Habillé de son seul glamour, l'illusionniste réalisait qu'il ne connaissait aucun mariage pour lequel on disait que le marié n'avait su quoi répondre à la question du prêtre. Mais d'aussi loin qu'on le sache, aucun marié ne s'était jamais présenté en nu intégral le jour de ses noces ; aucun prêtre travesti en flamant rose n'avait jamais conduit une telle cérémonie.

Ils étaient tous là. Les amis, la famille, les sujets, les gens... Le peuple. Tous s'attendaient au même dénouement inévitable, un brin d'ennui habillement dissimulé sous un regard pétillant de bonne humeur. A la base, le mariage n'est rien d'autre qu'une manière de s'étaler au grand publique et faire jaser toute une bande de cancans jaloux. Tout le monde le sait, et pourtant tout le monde le convoite.
Non, Maitre toki n'avait en soit que peut d'aspiration au mariage. Que lui avait-il prit d'accepter ? Un sortilège ? Un breuvage empoisonné ? Le sexe ?? Autant de questions et si peu de réponses, alors qu'il dévisageait, inquiet, les invités Vielles-Pies de son mariage.
Un a un, il imprimait dans sa mémoire le visage des Dragons Maudits ayants fait le déplacement pour assister à la cérémonie. Un jour peut être, Maitre toki révèlerait aux membres de sa guilde que les vêtements flamboyants dans lesquels Gwaedia et lui resplendissaient n'étaient qu'une illusion, qu'en réalité ils avaient fait le choix de s'unir pour l'éternité tel que la nature les avait conçu. Ou peut-être pas.

Une force l'agrippa soudainement par l'épaule, le forçant à se tourner dos à l'assistance. Ruberta resplendissait dans sa tenue de prêtresse affriolante. Elle offrait son plus beau sourire au couple qu'elle s'apprêtait à unir, leur tenant chacun une main comme on aide un enfant à traverser la route.

_Ah, mes joyeux petits poussinets ! Commença t-elle, pleine d'entrain. Vous êtes si beaux qu'on pourrait croire des anges. Ma chère, cette robe est une pure merveille qui met en valeur toutes vos formes les plus exquises. Évidemment, nous tous ici savons pertinemment que le blanc n'est là qu'un choix purement esthétique, plutôt que symbolique, étant donné le gonflement adorable de votre petit ventre nous rappelant que vous maîtrisez La Chose avec orfèvre ! Uh uh.
De toute façon, le coup de la Vierge en cloque on l'a tenté il y a bien longtemps avant vous, et déjà on n'y croyait pas vraiment. De nos jours, plus personne ne tomberait dans le panneau.
Allons, allons ! Dépêchons avant que je ne vous mette dans l'ambras ! Mais si notre sosie voulait bien se donner la peine de se manier le train pour nous rapporter les alliances...


Clignant des yeux comme si on venait de le tirer de songes obscures, Sensei fouilla nerveusement les innombrables poches d'un manteau lui tombant jusqu'aux chevilles, tout en espérant y trouver la boite de pans d'or.
Ce costume d'Elfe Noir qu'il se fit prêter pour l'occasion lui procurait un charisme certain. La sobriété de son ensemble semblait représenter l'exact opposé de la chaleur de son double, comme si Sensei craignait de se faire de l'ombre à lui-même en essayant de se mettre plus en valeur.
Lorsqu'il sentit la présence rassurante des tissus extravagants de la boite effleurer ses doigts, le double de Maitre toki ne put s'empêcher de pousser un soupir de soulagement avant de gravir les marches de l'autel.

_Magnifique ! Se réjouit Ruberta à la vue des alliances.

Toujours une main prisonnière de l'étreinte de la prêtresse, Gwaedia et Maitre toki utilisaient la seconde pour récolter tour à tour l'alliance de leur moitié comme ils s'apprêtaient à se les échanger.

_Tournez-vous un peut pour voir? Demanda Ruberta comme pour congédier le témoin. Hum, un régal de postérieur... Oust, maintenant.

Sensei obéit sans discuter avant de retrouver sa place auprès de Navi et Kyra, Darlyssa ne faisant pas parti des invités.
Alors commença le début du sermon.

_Je ne vous apprendrais rien en disant que si nous sommes réunis aujourd'hui, c'est pour unir cet homme et cette Haute-Elfe par les liens sacrés du métissage ! Sinon c'est que vous avez loupé quelques chapitres... Mais avant tout, si quelqu'un dans l'assemblée s'oppose à cette union, qu'il parle maintenant... et je lui décroche un de ces coup de boule dans les gencives qu'il en pissera du sang par le trou de balle ! Que les Dieux entendent notre appel et vous bénissent !

« Vai’lan, Za tasyhta dy páháteldeuh »
Quatre flammes gigantesques se manifestèrent comme si les torches aux coins de la scène étaient prises de combustion spontanée. Le rituel Elfique voulait que l'on obtienne la bénédiction de leurs Dieux élémentaires, et c'est ce que Gwaedia et Maitre toki répétaient pour invoquer chacune de leur manifestation.

« Ayiu, Za tasyhta dy páháteldeuh »
Aussi inattendue que le rugissement des geysers de feu, une pellicule de fine pluie cristalline vint noyer la présence brulante de Vai'lan. En son fort intérieur, Gwaedia ne doutait nullement que ces deux là se disputaient encore leur droit de véto.

« Jahdon, Za tasyhta dy páháteldeuh »
Le Dieu du vent manifesta son indignation face à temps d'insubordination et chassa Vai'lan et Ayiu d'une violente bourrasque. Il s'attarda quelque peu autour des mariés, peut-être de manière à juger la valeur de leur demande. C'est ainsi que Maitre toki traduisait le courant chaud qui serpentait entre ses veines, exerçant une légère pression contre son cœur comme pour le mettre au défi.

« Valar, Za tasyhta dy páháteldeuh »
En invoquant ce dernier nom, le vent parut se courber devant Valar qui le félicitait de la maturité dont il venait de faire preuve en séparant Vai'lan et Ayiu. C'était à lui, Dieu de la sagesse, que revenait la décision finale d'accorder où non leur bénédiction.
Le vent lui murmurait les pensées intimes des futurs époux, le feu lui révélait leurs désirs ardents, tandis que l'eau lui crachait toute la vérité de leurs sentiments.

De sa présence immatérielle, Valar venait de prendre sa décision et confisqua les bagues des jeunes mariés.
Gwaedia étudiait avec fascination cet anneau fin en mithril glisser simplement sur sa peau. Serti d'un joyau ovale incrusté en son centre d'un petit diamant pur, l'œil de Valar prenait place autour de son doigt comme pour veiller sur elle à jamais.
Maitre toki ne bougeait pas d'un cil. Si les Dieux Haut-Elfes décidaient qu'il n'était pas digne d'épouser la Reine de Celarawen, mieux valait faire bonne figure plutôt que de risquer une quelconque flagellation. Le large anneau en mithril qui s'aventurait vers lui pouvait tout aussi bien se voir garni de crocs acérés. Alors il ferma les yeux, laissant Valar lui confier sa bénédiction par les gravures en ancien Elfique décorant son alliance : Amour, Fidélité, Fécondité.

_Gwaedia Erahéniel ! Tonna Ruberta à plein poumons qu'elle en aurait fait rougir la Diva. Promettez-vous d'accompagner ces - voyons large- soixante prochaines années, Maitre toki ici présent, pour le meilleur et pour le rire, de l'aimer et le faire jouir, lui faire le ménage, et la couture, et laver ses chaussettes sales jusqu'à ce que sa mort vous sépare?

_ …
_Dites oui, qu'on en finisse !
_Je ne vais tout de même point signer pour ça ?!
_Quoi, les chaussettes sales ? Un peu de savon et puis s'en vont ! C'est l'amour bébé.
_Je ne promets rien...

_Et vous, Maitre toki, promettez-vous d'accompagner aussi longtemps que vous serrez capable de vieillir, Gwaedia Erahéniel ici présente, pour le meilleur et pour le rire, de l'aimer, la faire gémir, lui faire la cuisine, les carreaux, et lui couper les ongles de pied jusqu'à trépas?

_...
_Dites oui, c'est l'émotion.
_C'est à dire que...
_L'hygiène plantaire est la base de toute relation saine et durable.
_C'est pas que je dis non...

Le doute. Toujours le doute, jusqu'au dernier instant. Pourquoi avaient-ils décidé de se marier ? Pourquoi diraient-ils oui? En cet instant, le vide emplissait les moindres recoins de leur esprit incapable de rationalité.
Le mariage était plus un acte désespéré qu'un symbole, continuait Maitre toki dans ses réfections. Une manière de se rassurer de la fidélité de l'être aimé. Mais en décrochant son regard de l'anneau à son doigt pour se plonger dans la profondeur des yeux bleus de Gwaedia, Maitre toki comprit véritablement la signification du mariage. Voulait-il s'allier à la mère de leur futur enfant jusqu'au restant de ses jours ? Serait-il capable de l'aimer au point de lui confier sa vie de mortel ?

_Ouais.
_Bah, moi aussi.

_ILS ONT DIT OUI !!

Une violente pression derrière leur crâne manqua d'écraser leur tête l'une contre l'autre alors que Ruberta forçait les jeunes mariés à s'embrasser d'un geste brusque. Les acclamations ne tardèrent pas à exploser dans tous les sens. Des sifflements, des cris de joie, des applaudissements, et même quelques réparties légèrement grasses. Et si les mariés furent surpris de la manière dont on les fit s'embrasser, ils n'en laissaient rien paraitre tellement ils demeuraient obstinément agglutinés l'un à l'autre. Maitre toki et Gwaedia s'embrassaient comme pour la première fois à travers les ombres lointaines du couché de soleil.
Les musiciens se joignirent à cette montée d'émotions en habillant le fond sonore des félicitations par la poésie de leur musique onirique. Comme si les notes qui vibraient dans l'air leur déclenchaient un signal quelconque pour reprendre leur souffle, les mariés contemplaient leurs invités dans leur étreinte, alors qu'ils riaient aux éclats.

Tout cet amour électrifiait chacun des muscles de Ruberta qui ne tenait plus en place et sautillait avec frénésie. Et elle n'était pas la seule... Les flamants roses n'en supportaient plus d'avantage et décidèrent de s'envoler pour mieux se retrouver cote à cote dans les airs. Ils formaient là leur véritable vol conjugal vers une destination seulement connue d'eux, et volaient si bas que certains invités tentaient même de les attraper en sautant à leur rencontre. Les phénicoptères semblaient s'amuser de leur échec tellement on imaginait leur rire à travers les cris qu'ils poussaient ensemble. Ruberta aussi pouffait de joie. Elle n'avait d'yeux rêveurs que pour les flamants roses qui soudainement disparaissaient derrière un cocon de nuages colorés.
Depuis qu'Atrebürh avait quitté son corps, Ruberta ressentait très précisément cette absence à combler dans la partie de son âme qu'on lui avait arraché. Incomplète, elle cherchait désespérément un moyen de s'élever vers quelque chose de beaucoup plus léger. Un peu comme ces plumes roses qui tombaient du ciel.

C'est alors qu'elle sût. Elle pouvait voler. En son fort intérieur, Ruberta percevait une intense légèreté s'emparer d'elle. La présence lourde et malsaine d'Atrebürh qui la maintenait clouée au sol - lui et sa peur maladive du vide vivants cloitrés sous terre – ne demandait qu'à s'épanouir au grand air. L'amour donne des ailes parait-il, et les plumes de Ruberta frétillaient au contact de l'air d'un désir insupportable. Elle goutait cette sensation comme la liberté offerte lorsque vos pieds ne sont plus condamnés à toucher terre.

Avant même de s'en rendre compte, Ruberta venait de bousculer les mariés et plonger à cœur perdu parmi la foule d'invités qui s'écartait instinctivement sur son passage. Elle filait droit vers le vide tel un dindon poursuivit par un vil coyote. Bip, bip !
Tout s'enchaina très vite, mais un trop plein d'adrénaline général donnait l'illusion d'avoir tout le temps du monde pour gérer la situation. Un terrible mensonge...
Tel un preux chevalier sans peur, Maitre toki s'élança à la poursuite du flamant rose. Peut-être était-ce lui le coyote, mais il ne serait jamais assez rapide pour espérer rattraper sa proie. Ruberta n'était plus qu'à quelques pas du bord de la falaise. D'un cri désespéré, Maitre toki hurla son nom de manière inintelligible, espérant la libérer de l'envoutement provoqué par l'appel de ses congénères emplumés.

_Cette fois ça y est ! Explosa de bonheur Ruberta. Je vais être libre ! Je suis libre ! LIIBRE !!

Galvanisée par la plus grande bouffée d'air frais de toute son existence, Ruberta s'élança dans le vide et déploya ses ailes autour d'elle. Dans son élan, elle ferma les yeux de plaisir alors qu'elle jubilait de sentir le vent la soulever au dessus du Mont-Saint Nickel. Le hamac à plumes qu'elle agrippait avec force entre ses mains se gonfla en un bruit sourd mais résista à la pression exercée. Oui, Ruberta pleurait des larmes pétillantes de joie qu'elle déversait par litres. De toute la puissance de son coffre, elle poussa un cri triomphal qui raisonnait en un millier d'échos à travers les montagnes :

« Je VOOOOoole.... »

Maitre toki glissa et s'arrêta net au dernier moment. Il n'avait aperçu Ruberta qu'un court instant alors qu'elle tombait à pic à travers une mousse de nuages. Il était difficile de comprendre toutes les subtilités de son esprit lui persuadant qu'elle pouvait réellement voler. Mais allez savoir. Peut-être le pouvait-elle vraiment. Peut-être savourait-elle simplement l'accomplissement de son rêve le plus cher.
Une pensée fit décrocher un sourie à Maitre toki. Il se représentait Ruberta, flamant rose parmi tant d'autres, une patte dressée hors de l'eau d'un marécage, le cou vaniteusement replié et un poisson frétillant dans le bec. On venait bien d'assister au mariage d'un humain et d'une Haute-Elfe conduit par les frasques d'un phénicoptère. Toute fantaisie était permise.

_Vole, Ruberta. Vole. Tu l'auras bien mérité.


Désormais, en l'honneur du diction devenu célèbre « l'union fait la force, l'amour, et les bébés » ; les Déesses amantes ainsi que Valar et toute sa clique, connaitraient la naissance d'un nouvel acolyte.

On l'appellerait Ruberta : L'être-ange Métissage.

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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptyMar 29 Nov - 14:38

[quote name='Kyra' date='Monday 14/03/2011 à 12:59' post='124262']




* * *
Épilogue

Six mois plus tard.


Le travail avait commencé tard dans la nuit. Cela n'avait aucune importance car Maitre toki et Gwaedia ne trouvaient pas le sommeil. Assise enlacée dans les bras de son homme, Gwaedia reposait de dos contre le torse de Maitre toki d'un air vague. Elle tenait une pomme nonchalamment dans la main droite comme si le symbole de leurs étreintes passionnées pouvait lui porter chance. Le bras gauche levé au dessus d'elle pour mieux s'accrocher au cou de son époux, elle sentait son propre cœur battre avec frénésie sous la paume réconfortante de celui qui s'apprêtait à devenir père... d'un mort né. On pouvait trouver un certain érotisme dans cette image privée de contexte. La réalité était tout autre.

Dans une obscurité quasi totale, le couple reposait au contact rassurant d'un feu de cheminé sur le point de s'éteindre. Maitre toki n'avait rien à faire du froid qui se profilait. Il esquissait un sourire sans joie, tiraillé entre la beauté de ses songes et la réalité impitoyable. L'enfant n'avait plus donné aucun signe de vie depuis trop longtemps, si bien qu'on prédisait pour Gwaedia un accouchement si douloureux qu'elle risquait même de ne pas s'en sortir.
Il n'aurait pas manqué d'amour pourtant, ce petit être tant attendu par ses parents et leur deux peuples.
Maitre toki se souvenait très clairement d'une illusion venue tout droit des visons de Gwaedia alors qu'ils voguaient ensemble pour Celarawen. A cette époque, la crainte de ne pas se voir accepter par les Hauts-Elfes l'aveuglait sur les réelles intentions d'un seul Elfe dérangé. Il était encore loin de s'imaginer que cela constituerait le cadet de ses soucis. Cette nuit là, l'espace d'un songe chimérique, il avait vu son garçon tenant une plume à la main, et pourtant il savait que jamais plus il ne le reverrait.

Gwaedia trembla sous l'effet d'une nouvelle contraction. Elle cligna des yeux plusieurs fois avant de se tourner vers Maitre toki pour le regarder droit dans les yeux.

_Tu la veux? Demanda t-elle d'une voix douce. Tu n'as rien avalé et ça peut encore durer un moment.
Maitre toki ne put empêcher son sourire de prendre vie.
_Cette pomme te seras plus utile qu'à moi pour croquer dedans si tu as trop mal. Tu n'as rien avalé non plus depuis deux jours. Il te faut des forces, je ne veux pas te perdre.
_Oui, mais je n'en ai point l'envie. Il n'y aura point de cri ni de pleurs lorsque j'aurais fini.
_Si. Contredit Maitre toki. Des pleurs, il y en aura... Je vais en cuisines, il doit bien rester du bouillon de légume quelque part.
_Emmène-moi. Ne me laisse pas seule. Ne me laisse pas seule avec... Lui.

Se découvrant des forces qu'il croyait épuisées, Maitre toki souleva Gwaedia prise d'une nouvelle contraction pour la porter dans une pièce adjacente. En cuisines, il trouva une large table habituellement utilisée pour découper la viande ou préparer quelconques pâtisseries suivant l'humeur du chef. Il y déposa délicatement Gwaedia qui ne tarda pas à se plaindre du manque de confort, mais c'était toujours mieux que de la laisser trainer par terre avec un reste d'épluchures ayant échappé à la vigilance du balais.
Maitre toki trouva la marmite convoitée, puis tendit une louche du bouillon vers la bouche de Gwaedia, l'obligeant à boire son nectar... qu'elle recracha en un torrent de postillons.

_Prrfff ! C'est froid ! Cria t-elle. C'est froid, froid, froid ! (elle s'effondra en larmes et se laissa choir contre l'étreinte de Maitre toki) C'est tout froid. Je n'en peux plus, je veux que tu m'en débarrasse, je n'en veux plus, c'est tout froid à l'intérieur. Juste une coquille vide.
Personne. Il n'y a plus personne...


Cette résignation douloureuse brisa le cœur de Maitre toki qui ne pouvait rien faire d'autre que de serrer Gwaedia dans ses bras tremblants. Les nœuds dans son estomac étaient même allés jusqu'à se reproduire à l'intérieur de son crâne. La douleur était terrible. Celle de Gwaedia redoubla d'intensité :

_Il arrive...
_Je te porte jusqu'au divan.
_Me touche pas ! C'est ici et maintenant !

L'effort déformait le visage de Gwaedia. Les contractions faisaient appel à tant d'énergie qu'elle en oubliait même de respirer. Heureusement, quelques astuces de son premier accouchement lui revinrent en mémoire tandis que Maitre toki se demandait quoi faire. Il la soutenait, l'encourageait. Que pouvait-il bien faire de plus ?
L'un et l'autre n'avaient de cesse de penser que tous ces efforts n'aboutiraient pas à donner la vie, mais qu'ils préserveraient celle de Gwaedia. En avait-elle le désir pour autant ? Après tout, elle avait catégoriquement refusé l'aide de quiconque. « Pourquoi faire, un médecin? Il est mort. Tout le monde dehors ! » Et là bas, cette grande cheminée de pierre dans laquelle on faisait cuire la viande où bouillir les marmites. Elle pouvait tout aussi bien accueillir un bébé à incinérer...

Dans les méandres de leurs pensées les plus tragiques, la peau de Gwaedia parut s'éclaircir. Alors qu'elle poussait, plus par réflexe que par détermination, son regard se figea comme si son cœur venait tout juste de s'arrêter. La lumière qui émanait de sa peau s'intensifiait lentement mais se voulait de plus en plus brillante, de plus en plus chaleureuse.
Le cœur de la Haute-Elfe ne cessa pas de battre ; il redoublait d'intensité comme pour deux. Cette sensation réveilla quelque chose en elle. Une lueur pleine de vitalité qui électrifiait sa peau de vibrations bleues. Gwaedia clignotait. Malgré la douleur intense martyrisant toutes les parties de son corps : elle explosa de rire.

_Toki, toki... Je le sens ! Il vit !Arg. Bouge-toi, va le chercher !
_Mais comment est-ce p... ?
_Plus tard !

Il l'avait déjà fait. Se répétait-il. Il l'avait déjà fait, il l'avait déjà fait. Pas dans les cuisines, ni même sur une table de travail certes, mais le principe devait bien rester le même. Accroupi face aux jambes écartées de Gwaedia, Maitre toki se préparait comme pour réceptionner le boulet d'une catapulte entre les mains. Divers fluides organiques repeignait la table de manière peu attractive, mais celle-ci en avait déjà vu bien d'autres.

_Je vois quelque chose ! S'écria Maitre toki.
_Pas possible... Grinça Gwaedia.

Une pensée traversa l'esprit paniqué de Maitre toki. Si l'enfant qu'ils mettaient au monde s'avérait vraiment être en vie, il était simplement hors de question de le laisser attraper froid. Le papa se voyait déjà avec cette petite masse fragile dans les bras alors qu'il vidait les tiroirs en espérant trouver un tissu propre. Gwaedia ne voulait même pas y prêter attention. Du moins, jusqu'à cette vision incroyable où un rouleau à pâtisserie dominait une course épatante entre divers ustensiles, mortiers, couteaux, écumoires, volant juste au dessus d'elle.
La Haute-Elfe se mit à beugler tout un tas d'instructions dans l'espoir de redonner une infime part de lucidité envers son époux catastrophé. Il se présenta à elle qui le dévisageait entre ses jambes tremblantes, courbé comme un vieil homme ébranlé, les pupilles dilatées, une fourche gigantesque dans une main et un torchon de boucher dans l'autre.

_Tout va bien se passer. Se mit-il à chuchoter.
_Toki, la fourche... Baisse la fourche ! Par Valar, vire moi cette bidyeh de fourche DE MON BEBE !

La tête venait de franchir le col, mais il fallait encore laisser le temps aux épaules de se creuser un passage. Maitre toki tenait la tête du bébé entre ses mains durant toute cette phase difficile. Son esprit continuait à lui jouer des tours, imposant cette fois une image incongrue kidnapper son sens des réalités :

Il dévisageait la scène avec la même fascination que devant ces clefs encastrées dans le dos de certaines poupées, se demandant quelles réactions mécaniques il était possible de déclencher en remontant le mécanisme de Gwaedia. L'illusionniste secoua la tête dans l'espoir de chasser les mauvais tours de son imagination. Ces illusions mentales le déconcertait, soudain bien conscient de la proportion de ses propres dons.

Un éclair bleu plus tard, et l'enfant était né. De sa peau encore sale parvenait à irradier une lueur typique de certains Hauts-Elfes. Maitre toki portait le petit corps luminescent dans ses bras, avec cette expression sur le visage que seul un nouveau père peut avoir. Un léger coup de spatule sur le derrière et le bébé s'époumona d'un pleur mélodieux aux oreilles des parents.

_Mon bébé ! Pleurait de joie la maman.
_Par les Déesses !! Se mit à jurer le père d'une voix horrifiée.
_Par Valar, que se passe t-il ?!

Tout comme précédemment, Maitre toki apparaissait entre les cuisses écartées de Gwaedia, le regard complètement fou. Cette nouvelle vision se voyait beaucoup plus terrifiante que la précédente, Maitre toki se relevant d'une lenteur alarmante, le bébé dans une main, un couteau à viande dans une autre. C'est alors qu'il se mit à gémir :

_Son pénis...

_TOKI ! Qu'as-tu fais ??
_Je jure qu'il n'était pas là avant que je coupe le cordon...


* * *
Treize ans plus tard





Citation :

Cher journal,

Aujourd'hui c'est mon anniversaire... 13 ans, ça passe vite.
Tu sais, cette tradition débile qui veut qu'on célèbre le jour de sa venue au monde. Bin si jamais celui qui a inventé ça savait comment moi je suis née, je crois bien qu'il aurait abandonné l'idée.

Il paraît que mes premiers dons d'illusion hérités de mon père – mes glamours me corrigerait-il - sont apparus alors que je n'étais encore que dans le ventre de maman. Elle pensait accoucher d'un petit garçon mort-né, mais bon je suis une fille et bien vivante moi !
Non mais, un garçon ? Moi?? Tout ça à cause de quelques visions toutes bleues. Bin c'est raté. Ça c'était mes cheveux. Et mort-né ?? Alors, sois j'étais très timide et je me cachais pour rester bien au chaud, sois je me dissimulais de quelqu'un où de quelque chose de très méchant. Mon père pense que c'est la deuxième hypothèse, à cause de ce que lui auraient dit les Déesses.

Si tu veux connaître les derniers potins de Kaminoi, il paraît que l'Animato va bientôt se réveiller là-bas. C'est comme les volcans, avec eux on sait jamais exactement quand ils entreront en irruption. En attendant, je dois continuer à me faire discrète. Comme je me suis faite porter morte à ma naissance, il doit continuer d'ignorer que la Gardienne n'est plus seule, contrairement au temps de notre grand-mère.
A nous deux, Kyra et moi devront former La Gardienne de prison. Mon père dit que nous deviendrons les nouvelles Sineya et Vereesa, sauf qu'elles étaient des Déesses amoureuses, et que nous sommes sœurs et qu'on se dispute.

Tu vois, mes parents préfèrent n'avoir qu'une seule fille à protéger des sbires d'Animato aussi longtemps que possible. C'est plus pratique et plus tactique. Et ça serait même pour ça que ma mère avait-eu des visions de moi en petit garçon avant ma naissance. Personne ne devait savoir qui elle attendait vraiment. Ça, ou bien elle était ivre.
Moi ça me va dans un sens, mais je m'inquiète quand même un peu. Tout ce que je peux faire c'est entrainer mes glamours personnels pour dissimuler qui je suis réellement, et travailler mes potions alchimiques anti-démon.
Mon père espère qu'il arrivera à éviter le destin tragique de Kyra, qui est supposée mourir au combat contre Animato comme notre grand-mère. Pour ça il a besoin d'une arme secrète ; et cette arme, bin ça serait moi.

En fait, finalement, ma vie devrait être toute chamboulée maintenant que j'y pense. Tu veux savoir pourquoi? Répond pas, je vais te dire. Je m'apprête à me révéler au monde entier !
Bien sur, il y a beaucoup de rumeurs concernant mon existence, mais l'heure de la révélation finale est proche. Fini de raser les murs ! Aujourd'hui je suis une adoméchante, une vraie femme quoi ! Ou alors une demie-Femme pour être exact, mais je préfère le terme de Demie-Haute-Elfe. Tous ces tirets ça donne quand même plus de cachet. J'ai même apprit récemment que les Demi-Elfes étaient considérés comme une race ultime.
Waow ! Je suis Hautement-ultime. C'est peut-être pour ça que le mélange des races devient à la mode, tu crois pas?

Maintenant je vais te dire au revoir, mais s'il te plait ne sois pas triste ! Toi et moi on en a quand même vécu des choses pendant trois ans ! Sans toi je serais devenu folle, ou pire : un flamant rose !! Alors sans doute que je reviendrai voir si ça va dans les moments difficiles.
Je sais que tu as une grande responsabilité. Tu sais tellement de choses sur moi, et tout doit absolument rester secret !
C'est un gros risque, je suis d'accord. Avant j'étais trop jeune pour comprendre que je te mettais en danger. J'espère que tu me pardonnera. Mais t'en fais pas, je t'ai tellement alchimisé mon journal que personne n'arrivera jamais à t'ouvrir, et personne ne sera jamais capable de te lire !
(Enfin, si vous parvenez tout de même à lire ces lignes c'est qu'il y a du sang Elfique dans vos veines, parce que ça j'ai pas encore trouvé de parade. Mais les méchants ont rarement le sang Elfique hein?)
Dans le doute, je te garderai sur moi en permanence... Car à cause de mes parents ça à l'air de commencer à être à la mode le mélange des races. Mais moi j'aime bien le métissage : ça donne des bébés hybrides.

Bref, je suis une alchimiste surdouée avec du sang Haut-Elfe et Humain, la toute dernière descendante de Valar et des Déesses Amantes !

Après Vaelys la Vaillante,
Gwaedia la Brave,
Alaena la Sage (bouarf !) :

Je suis Kaerïss, la clandestine.
Et c'est tout ce que t'auras jamais besoin de savoir.



Jour X, Année X, point final.



PS : Mon père garde un secret incroyable sur lui, et depuis tout ce temps personne ne l'a jamais remarqué !! C'est pas grand chose, mais quand même...
Par contre si je te le dis je serais obligée de te bruler.
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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptySam 24 Mai - 16:34

Métissage - Page 2 Couver11



Première partie

* * *



À partir du moment où l'on commence à prononcer le mot "jadis", c'est qu'il est déjà trop tard. Père le prononçait de plus en plus souvent ces derniers temps.

"_Jadis, on se retrouvait sous l'intimité d'un arbre. Jadis, ce même arbre  nous gâtait de son fruit sucré et hydratant ; reflet rouge perdu dans les étoiles pétillantes d'un regard gourmand. Jadis, j'étais l'homme de sa vie, à ta mère, et ce regard était pour moi. Oh, c'était il y a longtemps. C'était jadis. Maintenant, eh bien..."

Maintenant elle en aimait un autre, mais le prononcer à voix haute aurait été cruel.

Père vécu de nombreuses et de nombreuses années qu'aucun être humain n'aurait jamais dû vivre. Pourtant il était encore là, le sourire en coin à rêvasser sur son lit mort. Enfin, juste un lit parmi tant d'autres sur lesquels il refusait systématiquement de mourir.

"_Je suis désolé, dit-il, désolé de te faire subir une nouvelle agonie. Si tu savais comme je suis fatigué de survivre à chacune d'entre elles.
_Ne t'excuses jamais d'être en vie, père.
_Oh eh ! Vipère toi-même !"

À cela il s'étouffa dans la quinte de toux de son rire.
Son truc à lui, lorsqu'une situation devenait mortellement sérieuse : dégainer la dérision (et tout particulièrement l'auto-dérision) aussi prestement qu'une lame finement aiguisée pour tuer. Le genre d'épée impossible à ne pas redouter ; et on la redoutait - la coquine imprévisible - aussi efficacement que les vannes inattendues de père.
Ces petites joutes n'en devenaient pourtant que trop rares à mesure où sa vie refusait de s'estomper. Devenir un vieillard barbant l'exaspérait, le rendait malade et passablement irritable. En somme, plus il se sentait cynique, plus le poids des âges le rattrapait, et plus il perdait son sens de l'humour, ce qui aggravait encore son cynisme.
Combien d'années écoulées durant lesquelles mère le pensait mort et enterré ? C'était cruel et père le savait très bien. Depuis, même si la perte de son humour ne jouait que sur son humeur, la perte de son amour, elle, détruisait toutes les forces vitales de son cœur. Ainsi s'éteignait-il à très, très petits feux pendant que mère, la reine Gwaedia des Hauts-Elfes du sud, quelque part, commençait une nouvelle vie.

"_Va, maintenant. Ce n'est pas aujourd'hui que je meurs. Tu as mieux à faire que de rester là et attendre ce qui n'arrive jamais. Ta mère n'en a pas encore tout à fait terminé avec moi on dirait.
_Tu sais très bien que mère t'aimera toujours.
_Raison de plus pour déguerpir d'ici. Je parie que tu manques fort à ton journal.
_J'ai passé l'âge depuis longtemps d'écrire dans un journal...
_Mais pas celui de progresser en alchimie. File dans ton atelier !
_Père (hausser le ton paraîtrait plus autoritaire et mature), j'ai 315 ans ! J'ai même passé la majorité Elfique depuis un moment et trois fois l'âge de mère lorsque vous vous êtes rencontrés. Alors celui de me faire renvoyer dans ma chambre...
_Faut-il vraiment que j'en touche un mot à ta sœur ? Je pourrais très bien l'invoquer dans l'instant.
_ (Par Valar !) Père, non !
_Père par-ci, père par-là, je ne suis pas un homme d'église, par les Déesses ! Ta mère t'a donné plus d'éducation que je n'en voulais sois-en certaine. "Papa" sonnait si bien dans la bouche de Kyra..."
Un soupir de résignation s'échappa de la bouche de Kaerïss. Mieux valait capituler.
"_Tu as gagné, je te laisse te reposer.
_Pas en paix, ça c'est certain.
_Non père, point de cela !
_ Bon sang, on croirait entendre ta mère. Kyra, ma fille, tu m'entends ?
_ D'accord, d'accord ! Par Valar, je déteste les fantômes encore plus que les vieillards."

Kaerïss s'éclipsa sans autre forme de politesse.
À l'extérieur de cet abri rocheux chaleureusement aménagée en nid douillet, un contraste chaud et froid saisissait par une soudaine pigmentation de volaille sur la peau. La neige et la glace recouvraient tout, si bien que la clarté du soleil vous en brûlait la rétine. Il faudrait un moment avant de pouvoir s'y accommoder, en particulier pour les yeux mi-Elfe mi-Homme de Kaerïss. Au moins père demeurait-il au chaud sous le confort d'un braseros, mais l'abandonner à son sort, seul dans la souffrance à converser avec des fantômes, était-ce réellement une bonne idée ?
Le frisson désagréable invoqué par cette pensée qui grimpait lentement le long de son échine acheva toute trace de culpabilité. Si père préférait la compagnie des fantômes à celle de sa fille bien vivante, qu'il se dépêche alors de mourir et de les rejoindre au plus vite ! Une pensée maladroite qui réaffirma les contours de la culpabilité de Kaerïss.
Quelque part, par delà cet horizon de montagnes sculptées dans la glace, la vie continuait inexorablement. Mais après tout un cycle exaltant d'errance et d'aventures conjointes avec sa sœur, de rencontres improbables, de combats épiques (ne craignons pas les mots), la solitude plongeait ses crocs aussi sauvagement que la morsure du froid.
Et la brume tombait.
Par chance, le souvenir que dans ces somptueux édifices immaculés vivait une forme de vie jusque là insoupçonnée, réchauffait un mental en déclin. Puis un jour, Lorsque la compagnie des Elfes Blancs deviendrait lassante, l'horizon serait de nouveau la prochaine destination.
Et tout recommencerait. Pour 10, pour 15, 40 ou 100 ans ? Une nouvelle vie, de nouveaux enfants, de nouvelles pertes, de nouvelles joies. De toutes ces différentes vies, chacune n'en dégageait qu'une saveur relative avec la perte d'une sœur. Père survivait jusque là, mais ensuite ? Adviendra forcément l'ultime agonie, et Kaerïss se retrouverait définitivement seule.
Je suis Kaerïss, la clandestine.
Retrouver mère et sa nouvelle vie ? La rumeur courait qu'elle était grosse. En langage plus raffiné il fallait traduire cela par enceinte, mais allez donc chercher une rumeur raffinée. Pour ce qu'elle en savait, le temps que la rumeur lui parvienne à ses grandes et horribles oreilles elfiques, mère avait sûrement déjà eu le temps de pondre... d'accoucher ! Stupide langage à rumeurs.
Les Elfes ne sont pas faits pour ressentir la nostalgie des temps anciens. C'est une question de survie à travers les âges. Ils évoluent et passent à autre chose, voilà comment devait résonner une Haute-Elfe. La nostalgie pesait pourtant lourd au fond des tripes : le bonheur de naître Elfe et de saigner de corps comme de cœur à la manière d'un être humain.
Mère dirait que la nostalgie se combat mais que, entre nous de mère à fille, contrairement aux croyances qui cherchaient à nous voiler la face, même les ancêtres Elfes stériles et millénaires du nord la ressentaient. Pourquoi sinon refuseraient-ils d'évoluer avec le monde qui les entoure ? Le cas des Elfes Blancs représentait un parfait exemple en la matière.
Père et mère savaient qu'un jour ce moment finirait par arriver. Lui, passerait à trépas ; elle, trouverait un autre chemin. Rien n'est éternel, et encore moins Maitre toki, l'illusionniste qui parvint à tromper jusqu'à la mort elle-même.
On le croyait tombé depuis si longtemps, le bougre, que même son nom finit par sombrer à son tour dans l'oubli : ultime illusion délivrant mère de son attachement pour lui. Oh, son amour résistait vaillamment ! Et chaque fois que Père ressentait la fin l'engloutir, Mère finissait toujours par le rappeler à elle. Rien n'est éternel, sinon l'amour ? C'était stupide. Personne ne peut aimer ainsi.
Kaerïss continuait d'errer dans ce paysage d'une pureté glaciale, les pensées en vrac. Elle avait tant vécu, et ses réserves d'énergie vitale diminuaient si lentement. Que faire d'une vie trop longue sans personne avec qui la partager ? Eh bien, pourquoi pas quelques expériences ! Père disait vrai sur un point, son journal lui manquait autant que le sentiment d'émerveillement qu'elle éprouvait à chaque création alchimique dans son atelier. L'enfant créative qu'elle était en ce temps ! Mais c'était jadis, encore ce mot de vieillard...
Subitement en alerte, une oreille effilée se dressa. Le chant mélancolique d'un grillon des neiges retenait l'attention de la demi-Elfe.
La brume tombait. Rien de bon n'arrive jamais à la tombée de la brume. Les grillons des neiges bientôt scintilleraient dans la glace en un nuage de faim inépuisable.
Cela commençait toujours de la même manière. D'abord le chant : rumeur sifflotante de leurs ailes tel un concert de flûtes. Une mélodie à la fois reposante et dramatique, qui jusque là vous donnait l'envie d'en écouter plus. Juste un petit peu plus : un chant si beau ne peut s'avérer si mauvais.
Puis le tintamarre de cymbales infernales vous prouvait le contraire. Si vos yeux vous permettaient d'apprécier à leur juste valeur la fourberie de ces minuscules dents voraces claquant telle une pluie d'aiguilles prêtes à vous écorcher l'espace d'un souffle de surprise, l'enchantement de beauté initiale serait brisé en un clin d'œil. Et au suivant, elles vous l'auraient de toutes façons déjà bouffé.
Kaerïss n'avait pas attendu pour fuir à travers la neige. Ses pas s'enfonçaient trop profondément et affectaient dangereusement la vitesse de sa course. Elle ne vit pas cette petite cavité de laquelle la première brume de grillons s'échappa et lui mordilla le mollet. Cela lui fit l'effet de plonger un pied dans une flaque d'eau acide, à cela prêt que la fumée qui s'en échappa vira couleur sang.
Ce petit nuage carnivore se démultiplia. Les brumes émergeaient lentement par petits tas à éviter tel un jeu sournois où le moindre faux pas causerait un pic de douleur infernal, une explosion de vapeur grise prête à se gorger d'hémoglobine.
L'abri naturel où reposait père se trouvait trop loin maintenant pour songer s'y réfugier. L'atelier bourré de munitions diverses serait la planque idéale pour se défendre, mais comment se battre contre un nuage ? En son temps, Kaerïss était une alchimiste confirmée. Elle trouverait un moyen. La nouvelle morsure acerbe qu'elle reçue semblait tenter de la dissuader d'oser réfléchir à cette éventualité.
Sous la tempête de son souffle court, Kaerïss fuyait de plus belle. Mais comment distancer les nuages ? À chaque question sa réponse ensanglantée. Le turquoise de sa chevelure, petit à petit, se chargeait de carmin.
L'alchimiste qui sommeillait en elle depuis toute gamine se réveilla en sursaut comme sorti avec torpeur du plus horrible des cauchemars. Et que disait Wiki ?
"En météorologie, un nuage est une masse visible constituée initialement d'une grande quantité de gouttelettes d’eau."
D'une grande quantité d'eau...
Du feu pour l'annihiler, de l'air pour l'évacuer !
La douleur de la course à travers cette brume carnivore de plus en plus opaque rappelait que même s'ils pouvaient vivre une éternité, les Elfes étaient des être mortels après tout. Se faire dévorer par un nuage serait une manière bien trop ridicule de passer à trépas, aussi une certaine colère enflammait le sang de ses veines. Le combustible ne manquait plus que de son oxydant.
Un jour lointain, Kaerïss découvrit par accident la formule permettant d'élaborer une fiole constituée d'un concentré d'émotions fulgurantes qu'elle baptisa le NUCLE (Noyau Ultra Cataclysmique de Ligaments Émotionnels). Père prétendait toujours qu'il tirait la force de ses illusions les plus puissantes de ses propres émotions. Si ses émotions devenaient alors le combustible de ses illusions, Kaerïss ne pouvait que parvenir à reproduire ce phénomène par alchimie, c'était élémentaire !
L’esquisse d'un schéma mathématique se dessinait dans son esprit, un peu comme les contours sombres et irréguliers prenant forme à travers l'opacité brumeuse qui cherchait à la dévorer.
Cette vision sonnait le début d'un espoir à l'échappatoire. La cabane  constituant son domicile qu'elle nommait atelier apparu ; ses jambes écorchées accentuèrent la cadence de la course.
La porte violemment rabattue dans son dos ne laisserait qu'un court sursis. La brume s'infiltrait déjà lentement à travers les planches des murs. En son centre, l'établi fut balayé de son désordre d'un revers de la main. L'atmosphère se voulait suffocante à mesure où la fumée de grillons s'épanouissait. Vite journal, j'ai besoin de ta mémoire pour retrouver la formule du NUCLE !
Les vêtements dépecés, les poumons en feu, le regard fou et les cheveux entièrement peinturés de son propre sang, Kaerïss s'extasia d'un effrayant et pourtant radieux sourire de victoire. La note laissée dans son journal stipulait qu'une solution élaborée d'avance pour cas de danger extrême l'attendait sur l'étagère.
Fiole NUCLE dans une main, oxygène explosif dans l'autre, une dernière pensée pour son journal qui mériterait de pouvoir prendre ses jambes à son cou s'il voulait survivre à ce qui allait suivre, Kaerïss éclata les fioles ensemble et s'écria :

"_Journal, mon beau journal, dis moi ! Qui est la plus intelligente du royaume ?"
Éclair bleu déchirant.
"_Clairement pas toi...
(Plait-il ? Venait-on réellement de lui susurrer une réponse à l'oreille ?)
Chaleur infernale soufflant bois et grillons en brindilles de charbon.
"_Journal, qu' est  ce   q u e    j ' a  i     f   a    i      t   .     .     .       !

Champignon.
Finition NUCLE et AIR.


Dernière édition par Maitre Toki le Sam 24 Mai - 16:40, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Métissage   Métissage - Page 2 EmptySam 24 Mai - 16:35

Deuxième partie

* * *


Image floue d'une silhouette aux contours tremblants, l'homme paraissait aussi irréel qu'il l'était. On lui devinait d'apparence le même âge qu'elle, mais Kaerïss était sacrément loin de l'image que l'on pouvait s'attendre de la part d'une tricentenaire. Le cheveu turquoise, souple et soyeux, bien que présentement aussi raide et emmêlé que poisseux de sang. Un visage lisse et fin à peine marqué, sinon par ces toutes récentes marques de contusion et déformé par une expression d'hébétement. Le teint pale et lumineux comme baigné de sa propre source de lumière, toutefois recouvert de suie et de sang en cet instant.
Après dissipation totale d'un écran de fumée, l'un pouvait très bien paraître le reflet de l'autre à travers un miroir doté du sens de l'humour.

"_Si j'étais un homme...
_Si j'étais une femme..."
D'une même voix : "Je serais toi."
Flippant.
"_Serais-tu qui je pense que tu es ?"
Cette drôle de question méritait sa drôle de réponse.
"_A qui penses-tu ? Je suis Ker'Ozen.
_Non, non, non, non, non ! Personne, PERSONNE ! ne connaît la formule secrète de journal à part moi.
_Et moi."
C'était ridicule.
"_Je viens de naître dans le noyau d'une explosion nucléaire, non ça ne l'est pas..."
Touché.
"_Par pitié... Ne me dis pas que je viens de créer un télépathe par accident alchimique.
_Allons, ne te montre pas si bête, je ne suis qu'un journal. Je te connais simplement par cœur."
C'était de pire en pire.
"_Regarde-moi bien Gler'Ozen. (Depuis son enfance, Kaerïss développait certaines difficultés avec les mots trop compliqués, même ceux venants de sa propre création). Petit a) Je me trouve dans un état lamentable comme cela ne m'est que rarement arrivée - et les témoins survivants ne se comptent que sur le majeur d'un poing levé.
_Par Valar ! Cette grossièreté...
_Assez ! Journal, je n'ai pas touché à l'alchimie depuis peut être un siècle et voilà : petit b) nouvelle catastrophe ! Je suis vulgaire si j'en ai envie et jamais jusque là tu ne t'en étais insurgé.
_Eh bien, jusque là je ne m'étais jamais incarné pour en avoir le loisir.
_Alors continue de je pas l'être ou abstiens toi de tout commentaire, sinon petit c) je trouve le moyen de te sceller à jamais. Je suis très douée tu sais.
_Tellement douée que tu viens de sceller le destin des Elfes Blancs en supprimant pratiquement toute la neige de la région ?"

Battements de cils fous l'espace d'un instant nécessaire à la réflexion.
La neige avait disparu sur toute une circonférence chaotique dont Kaerïss en représentait le centre. Difficile de déterminer jusqu'où les cendres chaudes encore fumantes noircissaient le paysage d'un sombre trou béant dans le désert blanc. Au moins les grillons carnivores ne représenteraient-ils plus une menace pour personne, mais quelle désolation ! Pourvu que leur disparition n'engendre pas quelque dérèglement sur l'écosystème, soit dit en passant...
Et soudain, la prise de conscience :

"_Père !"
L'explosion l'avait forcément atteint. Alors une nouvelle course débuta, mais une main l'arrêta aussi sec.
"_Lâche-moi journal !
_Mais tu ne peux pas me laisser seul ici, au grand air, à la vue de tous, si vulnérable, si... exposé.
_Écoute, journal, la pudeur est la plus grande des qualités pour le grimoire que tu étais, seulement je n'ai pas de tiroirs assez grand à ma disposition pour te ranger. À la réflexion, une armoire... si je ne venais pas de la faire exploser avec tout le reste ! Tu as des jambes maintenant journal. Utilise-les.
_Tu n'as pas l'air décidé de m'appeler par mon nom.
_Ton nom a toujours été journal. Kel'Oben hein ? C'était seulement ma première formule alchimique spécialement créée pour empêcher quiconque de te lire sous peine de brûler vif. Un échec cuisant de ta première version sottement non ignifugée. Bref, je dois vite vérifier si je n'ai pas tué mon père avant qu'il ne meurt. Un pied devant l'autre pour marcher ; plus vite pour courir. Tu verras on s'y fait vite."

Journal testa l'efficacité de ses nouvelles jambes en courant les bras écartés de manière à garder constamment l'équilibre. Lorsqu'il flanchait du côté droit, journal battait vaillamment de ce même bras pour se redresser. Lorsqu'il tanguait du côté inverse, le bras gauche prenait le relais. Kaerïss se demandait s'il finirait par s'envoler en accélérant encore un peu, mais père demeurant introuvable, l'heure n'était vraiment pas à la rigolade.
Hélas, jamais on ne retrouva Maitre toki. Ce n'était pas le première fois qu'il faisait le coup après tout. Qui de mieux qu'un illusionniste pour disparaître sans laisser aucune trace ? Cette fois pourtant, le doute persistait. L'explosion avait été d'une telle violence ! Kaerïss ne voulait pas se retrouver coupable de la mort de père. Trop de culpabilité à gérer ; ses émotions causaient trop de variables dans les sciences de l'univers. Aussi préférait-elle penser que quelque part, mère venait de prononcer à un autre le mot de la fin, mais également celui du commencement. Oui.
En attendant, mieux valait se préparer au courroux des Elfes Blancs. Bien qu'on leur administra tous les soins nécessaires à leurs blessures une fois de retour au domaine, on établissait tout de même un procès pour grave atteinte sur l'environnement quelques jours plus tard.
Que serait allé inventer Kyra comme excuse incroyable pour sa défense en une telle situation ? En devenant femme, Kaerïss s'était largement inspirée de ses sœurs afin de se sortir de toutes les situations imaginables. A 315 ans, elle mêlait avec une habileté redoutable l'usage des charmes détonant d'Alaena et la roublardise impériale de Kyra.
Un problème subsistait tout de même. Pour se défendre lors d'un procès, n'étions-nous pas sensé mentir afin de prouver son innocence en toute bonne fois ? La vérité ne donnait jamais aucun résultat, c'était scientifique. Aussi imparable que le chiffre 42 est la réponse à la grande question sur la vie, l'univers et le reste. Dès lors, journal et Kaerïss comprirent qu'ils étaient fichus lorsque :

"_Vous n'oseriez tout de même pas exiler une femme enceinte ? "
Silence. Kaerïss n'en revenait pas de s'entendre prononcer cette phrase.
"_Enceinte ? (Le roi tiqua sur ce mot) Nos mâles ne peuvent procréer. Qui d'autre serait alors en mesure de vous enfanter, si ce n'est votre journal, (quelle drôle d'idée) votre père ou, montrons-nous fantaisistes,  un animal ?
_Personne ! contra Kaerïss.
_Personne ? (Sourire amusé).
_Je veux dire, cela ne vous regarde en rien !
_Je vois. À vrai dire, il est assez compréhensible d'éprouver une certaine gène quant à la pratique de l'inceste ou de la zoophilie.
_Mais point du tout ! s'affola Kaerïss.
_Soit, soit. Soyez-en fière si cela vous chante."

Ce dialogue de sourd ne mènerait nul part sinon au châtiment du roi.
Kaerïss s'inspira alors du souvenir impétueux de Kyra qui en désespoir de cause, ripostait systématiquement par de jolies provocations. Alaena ne se trouvait pas loin non plus derrière ce regard éperdu de promesses exquises :

"_Comment ne pas éprouver de fierté face au cadeau de la fertilité unique du roi des Elfes Blancs ?"
Le cœur de Kaerïss lui matraquait la poitrine. Accuser le roi de briser la pureté consanguine de leur race représentait le pire des affronts ; Kyra serait si fière ! L'aguicher était peut être encore pire ; Alaena lui en décrocherait une médaille d'or, et pas du toc !
Il était intéressant cependant de noter le roi ranger l'inceste du coté de la zoophilie. De la part d'un peuple à forte parenté qui élevait au rang de roi le seul mâle capable d'engendrer la vie auprès d'une reine, cette dernière fatalement n'en demeurait pas moins sa cousine, si ce n'est sa propre sœur. Mais pour un peuple aussi fier, persuadé de la nécessité de conserver la pureté de sa lignée, le métissage restait encore un sacré tabou. L'inceste existait peut-être chez les impurs, mais indiscutablement pas chez les Elfes Blancs.
Et le roi s'emporta :

"_Que l'on m’exile immédiatement cette impie !
_Atrebürh sors de ce corps ! riposta la condamnée d'un cri de rage."
D'une rage bleue. Parfaitement bleue, telle une vision troublée par certains rares champignons hallucinogènes. Le monde perdait soudainement chacune de ses nuances de couleurs. Seul persistait un dégradé de bleus. Kaerïss comprit alors plusieurs choses simultanément.
Tout d'abord, ses glamours personnels décidèrent à sa place de la faire disparaître dans la foule. Pouf ! Ce n'était pas forcément une mauvaise idée pour fuir.
Ensuite, journal possédait exactement les mêmes facultés d'invisibilité qu'elle. Pas étonnant : il lui ressemblait tellement avec ses cheveux turquoise et ce même teint de peau étincelant que l'on pouvait les prendre pour des jumeaux.
Enfin, Kaerïss profita de la confusion alentour afin d'informer  discrètement son journal de sa dernière révélation :

"_Je viens d'avoir une vision telle que mère me l'a décrite lorsque j'étais une enfant. Tout est devenu bleu ! C'est certain, je vais donner naissance à un garçon.
_Mais si je me souviens bien, tu disais que sa vision était erronée, puisque tu née, toi.
_Tout à fait ! Le bleu ne symbolisait point la venue d'un garçon comme c'est le cas aujourd'hui, assurément. C'était la couleur de mes cheveux.
_Ou peut-être... Je veux dire qu'en vérité..."

Journal marqua un temps d'arrêt lorsqu'il réalisa que Kaerïss et lui s'exilèrent par leurs propres moyens hors du domaine, tandis qu'ils marchaient tous deux en direction du sud. Leur destination était une surprise, il ne fallait pas le laisser deviner trop vite. Alors Kaerïss le pressa :

"_Oui ? Eh bien accouche !
_En vérité, finit-il par reprendre, la vision représentait bien un garçon. Elle me représentait, moi. Regarde-nous : je suis ton reflet masculin craché. Tu n'aurais jamais dû naitre fille. Les Déesses en ont décidé simplement autrement lors d'un quelconque caprice pour assurer leur descendance auprès de Kyra et de toi.
_Va savoir, les hypothèses à ce sujet sont légion, mais nous avons encore un peu moins de neuf mois de trajet pour en débattre."
Leur conversation ne semblait jamais pouvoir s'arrêter. La nuit tomba vite, et pourtant ni la fatigue ni le froid ne parvint à les convaincre de trouver un endroit où s'arrêter pour manger et dormir. Tous ces bavardages causeraient inévitablement leur perte, mais journal et Kaerïss avaient tant de temps à rattraper.
"_Confirais-tu une dernière chose à ton journal ? demanda celui-ci d'un ton pressant.
_Qu'y aurait-il encore à confesser maintenant ?
_C'est à propos du père, par Valar de Valar !"

Kaerïss sourit à son journal tandis qu'ils s’effaçaient dans le clair de lune. Journal s'interrogeait au sujet du père de son enfant, tandis qu'elle s'interrogeait à propos du sien.
Il y avait-il une vie après Maitre toki ? Mère connaissait déjà la réponse, pas la peine d'épiloguer douze pages sur le sujet.
Un regard posé sur son ventre, Kaerïss comprit que même à 315 ans, il était encore possible de grandir à cet age. A partir d'aujourd'hui, la vie ne faisait que commencer.






Cher journal,

Récemment j'ai appris un truc ex-tra-or-dinaire ! Vois-tu, je détiens la preuve irréfupable... irréfutable ! que tous les Elfes Blancs ne sont pas aussi stériles que le souhaiterait le roi... Mais bon, chut ! pas un mot . Malheur à qui le découvrirait. Soyons prudents et donnons un nom de code à cette preuve beaucoup trop dangereuse pour être ébruitée.
Que penses-tu de Sensei... ?

Jour 116, année 4102, mais cela est une autre histoire.




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